Approche métaphorique du vieillir (« portrait chinois »)
(pages 29-30 du livre Vieillir en philosophe ).
Cet exercice est un peu inhabituel, mais il est pratiqué par certains professeurs de philosophie afin de permettre la réflexion sur un concept à partir des résonances, des connotations multiples qu’il évoque. Un registre de métaphores peut engendrer toute une ligne de pensée. Bachelard a montré à quel point l’imaginaire est présent dans les activités intellectuelles, y compris celles qui semblent les plus abstraites.
Cet exercice devrait être fait sans trop réfléchir dans un premier temps, en laissant aller votre imagination pour retenir les images qui vous viennent spontanément à l’esprit. Ensuite, dans un second temps, vous revenez sur ces images pour essayer, par un effort de réflexion, de dégager ce qu’elles signifient, ce qu’elles impliquent du point de vue de l’analyse conceptuelle.
L’exercice se présente sous la forme d’un tableau, avec les consignes suivantes : Parmi les 10 propositions de gauche :
1°) Répondre à au moins 5 suggestions
2°) Justifiez chacune en quelques mots
Exemple : Si la vieillesse était un animal,
a) ce serait un éléphant b) parce qu’il est lent et majestueux
Si la vieillesse était : | Ce serait : | Parce que : | |
Une couleur | |||
Un bruit ou une musique | |||
Un animal | |||
Un lieu ou un paysage | |||
Un végétal | |||
Une personne (grand homme, personne célèbre…) | |||
Un métier | |||
Une œuvre d’art | |||
Une période de l’histoire | |||
Un objet |
Vous pouvez déposer vos réponses dans la fenêtre ci-dessous. Je les commenterai en faisant les remarques qu’elles m’inspireront.
Je suis en train de lire votre livre et je découvre votre site. Je vous remercie beaucoup pour toutes les pistes de réflexion qu’ils permettent d’ouvrir, en particulier par ces petits exercices ludiques. Si la mort était …
– une couleur : le blanc je ne sais pas si j’ai plutôt pensé au « blanchiment » des personnes âgées (peau, cheveux) ou bien aux habits de deuil que portent fréquemment les personnes âgées en Asie.
– une oeuvre d’art : tous les autoportraits de Rembrandt, pour l’évolution et la transmission d’un regard lucide.
– un animal : un paresseux, pour la lenteur des mouvements. La vieillesse conduit parfois à cette forme de lenteur. De nombreuses personnes âgées vivent dans mon quartier, pour nombre d’entre-elles je constate des difficultés de déplacements et une réduction de leur espace…que j’appréhende comme un possible de ma vieillesse.
-un végétal : un arbre feuillu (chêne, hêtre) vient d’abord à l’esprit pour son enracinement, pour son développement continu pour l’impression de plénitude dégagée puis, paradoxalement, vient l’image d’une graine emportée par le vent pour la légèreté, pour le hasard du transport et du voyage .
– un bruit ou une musique : l’évocation, peut-être fréquente et banale, du murmure régulier et continu de l’écoulement d’un ruisseau calme (et non plus le bruit d’un torrent, associé plutôt à l’énergie et à l’impétuosité de la jeunesse).
Il est clair que pour vous la vieillesse est associée aux idées de calme, de tranquillité, de sérénité, et comme vous le dites vous-même de plénitude. Vous la voyez plutôt comme un processus naturel, une sorte d’équilibre, l’atteinte d’une réalisation de soi. En témoigne notamment le fait que vous avez choisi des images qui évoquent la nature : l’animal, le végétal, le ruisseau.
Cette représentation de la vieillesse s’oppose à toutes celles qui y voient plutôt un déclin, une dégradation, ou une menace.
Correspond-elle à une vision idéalisée de la vieillesse, à l’image que vous vous en faites depuis un âge encore jeune, ou bien exprime-t-elle une expérience réelle et présente ? Vous seule pouvez répondre à cette question !
Je découvre votre site par un dossier dans un bulletin GMF !
Si la vieillesse était une couleur ce serait le mauve-violet parce que cette couleur représente pour moi le calme et la sérénité !
Si la vieillesse était un animal ce serait un chat parce qu’il sait ce qui est « bon pour lui », il sait se ménager, s’étirer avant tout effort !
Si la vieillesse était un personnage célèbre ce serait le Dalai lama qui traverse le temps avec sagesse, il me paraît impossible de le « mettre dans un case » jeune, vieux, il est hors du temps !
Si la vieillesse était un métier ce serait philosophe parce qu’il traverse également les siècles avec sagesse tout en réinventant le monde à chaque instant !
Si la vieillesse était un lieu ou un paysage ce serait la mer ou l’océan à l’origine de la vie sur notre planète, ils traversent les millénaires toujours en mouvement, toujours recommencés !
Incontestablement, votre conception de la vieillesse est dominée par l’idée de sagesse – le mot revient d’ailleurs deux fois dans votre texte. Vous voyez essentiellement la vieillesse comme « l’âge de la lenteur », qui permet de prendre de la distance par rapport aux turbulences du monde.
C’est aussi un lien entre les personnes et les époques : la métaphore de l’océan fait de la vieillesse un facteur de liaison, de continuité et de communication.
D’où vous vient cette image très positive de la vieillesse ? Est-ce la manière dont vous la vivez pour vous (j’ignore votre âge, donc je ne sais pas si elle est pour vous une expérience personnelle) ou bien vient-elle de l’observation des personnes âgées autour de vous et dans l’histoire ou la littérature ?
Je décèle dans votre « portrait » une petite contradiction. D’un côté, vous lui attribuez tout un ensemble de qualités spécifiques : calme, sérénité, intelligence, etc. Mais d’un autre côté, vous dites du Dalaï lama, qui est l’une de vos figures choisies, qu’il est « impossible de le mettre dans une case jeune ou vieux, il est hors du temps ».
Il semblerait donc que d’une part, la vieillesse soit pour vous un « âge de la vie » par opposition à d’autres (jeunesse, maturité, etc.) ; mais que d’autre part, elle soit un état intemporel, échappant à l’opposition jeune/vieux et à la notion même d’âge.
Comment conciliez-vous ces deux aspects contradictoires ?
Bonjour,
Merci pour votre analyse de « mon portrait chinois ». Je vous explique comment j’ai découvert avec « plaisir » votre site. C’est dans la brochure PARTENAIRE GMF ; j’ai lu avec attention et grand intérêt vos réponses aux questions « Et si vieillir était synonyme de plaisir ? » Dans vos réponses j’ai retrouvé certaines de mes conceptions.
Vous me demandez « d’où me vient cette image positive de la vieillesse ? » à vrai je suis naturellement positive, je crois que dans tout les étapes de notre vie, quelles soient calmes et sereines ou agitées et tempétueuses, nous pouvons apprendre à trouver du positif c’est-à-dire apprendre à tirer de nos expériences vécues comme difficiles tout ce qui peut être mobilisateur, nous faire « grandir », avancer et rebondir.
J’aurai 70 ans en septembre, je ne me déclare pas et ne me ressens pas « vieille », je vis simplement l’instant présent avec le plus de sérénité possible, je suis en excellente forme physique et mentale et je m’emploie à faire vivre en harmonie ces deux parties de moi-même que je commence à mieux connaître et que j’apprivoise chaque jour.
La petite contradiction que vous décelez dans « mon portrait chinois » est certainement une présentation erronée et/ou incomplète ! Non la vieillesse n’est pas pour moi un « âge de la vie » par opposition à d’autres (jeunesse, maturité, etc.) !
Si je fais un retour sur mon passé et sur les bientôt 70 années écoulées, je fais le constat que j’ai vécu chaque « période » mon enfance, mon adolescence, ma vie de jeune femme, la quarantaine, la cinquantaine, la soixantaine et bientôt la « septantaine » (comme diraient les suisses et les belges), sans me donner de limites, sans peur, sans être affectée par les anniversaires et les changements de dizaines ! Etait-ce de l’inconscience, de la sagesse (non pas encore vraiment), peut-être du « réalisme », je ne pouvais « rien changer » au temps qui passe et je l’acceptais « tout simplement » ! Je me dis aujourd’hui que j’ai eu beau coup de chance, c’était une « force » qui m’animait et me faisait aller toujours de l’avant avec le même enthousiasme et le même optimisme !
Donc pour moi il n’y avait pas « d’âge », il n’y a toujours pas d’âge de la vie en opposition, il y a la VIE tout simplement, et ce que nous sommes en capacité d’en faire soit une « route lumineuse », soit un « chemin rocailleux » !
Vous dites « vieillir, c’est prendre conscience que le temps est limité, dans une existence qui semblait infinie » ! Et bien autant que je m’en souvienne, depuis ma petite enfance j’ai intuitivement eu « conscience de ce temps limité », c’est ce qui m’a certainement permis « de faire mes choix » et de « juger ce qui valait la peine d’être vécu » !
Je suis actuellement dans la période : « CICERON vieillir c’est passer à un autre état » ; donc je passe « à l’affirmation de moi par la sagesse et la réflexion », dans une attitude plus « qualitative » à la « recherche du meilleur » !
Bien cordialement.
Jo VINCENT
PS : J’affectionne particulièrement cette pensée d’Albert EINSTEIN
« Il y a deux façons d’envisager la vie. La première est de croire que rien n’est merveilleux. La seconde de considérer que tout tient du miracle. Je choisis la seconde. »
J’ai souvent intuitivement choisi la seconde, aujourd’hui je la choisis plus « en conscience ».
La phrase d’Einstein que vous citez est en effet profonde. Mais je me demande quel sens lui donner quand on n’est pas croyant. En effet la notion de “miracle” est liée à la religion : par exemple, les miracles du Christ dans l’Evangile sont supposés prouver qu’il est bien fils de Dieu.
Or ce n’est certainement pas en ce sens qu’Einstein emploie ce mot. Quelle signification “profane’’ peut-on lui donner ? Comment trouver la vie “miraculeuse” sans se référer à quelque dieu ? Serait-ce un synonyme du hasard ? En un sens, chacun de nous est le fruit d’un hasard très improbable : il y avait une chance sur des millions pour que nos parents se rencontrent, et qu’ils engendrent la personne que je suis plutôt qu’une autre qui aurait pu naître “à ma place” s’ils avaient fait l’amour un autre jour. Mais peut-on parler en ce cas de “miracle” ? Et pourquoi cette prise de conscience conduit-elle à l’optimisme que vous exprimez avec beaucoup de force et de justesse ?
Voilà quelques-unes des questions que m’inspire votre réponse.
Bonjour Voici les réponses qui me sont venues à l’esprit. Je décris la vieillesse comme je la sens à 68 ans, pas de manière générale en me projetant dans le futur.
Si la vieillesse était : Ce serait : Parce que :
Une couleur Le rose clair Tout est permis ou presque
Un bruit ou une musique Le nom m’échappe Donne l’impression qu’on Voyage en liberté sur une route…..
Un animal chat Il mène sa vie pépère Repos, tranquillité, liberté, priorités
Un lieu ou un paysage De neige Pour le calme et les difficultés à surpasser
Un végétal De la mousse Pour la douceur et que cela pousse tout seul
Une personne (grand homme, personne célèbre…) L’abbé Pierre Pas d’âge pour les braves, Continuer jusqu’au bout
Un métier boulanger Existe depuis longtemps et Continuera
Une œuvre d’art Un tableau de femme de Picasso Parce que dans plusieurs Tableaux , il représente les femmes comme regardant à 180°, étudiant, réfléchissant sur ce qu’elles voient. L’expérience d’une vie qui se termine permet cela.
Une période de l’histoire Aucune idée
Un objet Un stylo
avec lequel par nos choix on écrit le livre De notre vie
Merci pour votre site très interessant. Nicole Meilhac
Votre « portrait chinois » me semble dégager une conception de la vieillesse comme accès à une liberté portée à son comble : « tout est permis ou presque ». La libération des contraintes qui caractérisaient l’enfance (soumission à l’autorité des parents) et la vie adulte (travail, famille, conventions sociales, etc.) expliquent cette impression de liberté sans limites que donne la vieillesse : « je n’ai plus rien à perdre », j’ai de moins en moins d’attachements qui me tiennent (dans tous les sens du terme).
Mais en même temps, vous exprimez aussi une conception de la vieillesse comme atteinte du repos, de l’immobilité, de l’inaction (cf ce que vous dites du chat).
Il y a donc, me semble-t-il, une certaine tension dans votre « portrait » entre deux tendances contradictoires : d’une part, « continuer jusqu’au bout », s’obstiner, lutter, avancer (l’abbé Pierre, le boulanger) ; d’autre part, se reposer, s’arrêter, réfléchir, faire une pause (le chat, le paysage, la mousse).
C’est vrai que quand on vieillit, on est souvent déchiré entre un sentiment d’urgence (plus beaucoup de temps pour faire ce qu’on veut faire) et un désir opposé de ralentir, de prendre son temps, de prendre du recul, voire de ne rien faire.
Vos deux dernières images évoquent l’art : la peinture avec Picasso, la littérature avec le stylo qui permet « d’écrire un livre » (le livre de notre vie). Ne serait-ce pas parce que l’art est peut-être la seule façon de réconcilier ces deux impulsions contradictoires ? L’artiste est pressé d’achever son oeuvre, de finir son tableau, de terminer son livre – mais pour qu’elle soit réussie il lui faut prendre son temps, s’arrêter pour observer , « étudier ce qu’il voit », réfléchir, hésiter pour trouver la meilleure touche ou la meilleure phrase – donc réfréner sa hâte. Ne seriez-vous pas tentée d’être, à votre manière, une artiste ?
où est la fenêtre pour enregistrer mes choix?
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Une couleur :
Le gris :
à cause des cheveux, c’est triste mais très beau à la fois associé au rouge.
Un bruit :
Un robinet qui goutte :
C’est agaçant, lancinant, et ça persiste.(Aussi à cause des fuites urinaires !)
Un animal :
Une tortue : C »est vouté, ça se protège, ça progresse sûrement, ça se fout des autres.
Un lieu ou un paysage :
Un village au centre de la France en plein été.
Il fait chaud, c’est désert, les volets sont fermés, il y a des monuments très beaux et très anciens qui voudraient raconter des histoires, mais il n’y a personne pour les écouter.
Un végétal :
Le liseron : C’est persistant, ça s’accroche, produit de belles fleurs blanches à la nique du monde qui voudrait les arracher.
Un personnage célèbre :
De Gaulle :
Pour sa force sa détermination sa combativité sa sagesse, tout ce qui permet de durer.
Un métier :
Rond de cuir :
Un peu usant et poussiéreux mais qui a la volonté de continuer son triste boulot.
Une oeuvre d’art :
Le radeau de la méduse :
Les copains disparaissent et moi je m’accroche.
Une période de l’histoire :
La révolution :
Les idées changent, le monde est en grandes mutations, les têtes tombent sauf la mienne !
Un objet :
Un vieux manche de pioche lustré par toutes les mains qui l’ont empoigné.
Je précise tout de même que je pense à un vieil oncle qui aura cent ans l’année prochaine, a passé sa jeunesse (7 ans) dans un camp de prisonniers du côté de la Baltique, sauvé par le chef de ce camp qui était médecin et l’appelait « son miraculé ».
Plus tard il fut opéré du coeur suite à un AVC. Aujourd’hui il vit seul dans sa petite maison, cultive encore quelques tomates, entretien son lopin, malgré une dégénérescence maculaire qui le rend presque aveugle, se déglingue de tous côtés, mais espère bientôt fêter son centenaire !
Ce qui me frappe dans votre « portrait » de la vieillesse, c’est l’ambivalence. Presque chaque proposition prend la forme d’une opposition, scandée par une série de « mais » : triste mais beau, monuments qui voudraient raconter des histoires mais sans personne pour les écouter, usant et poussiéreux mais avec la volonté de continuer son boulot, les copains disparaissent mais moi je m’accroche, etc.
Vous concevez la vieillesse essentiellement comme une lutte : d’un côté le déclin, la décrépitude, la solitude, mais de l’autre une volonté obstinée, opiniâtre, de continuer à vivre, à s’affirmer envers et contre tout. Le vieil oncle dont vous parlez à la fin de votre contribution en est l’illustration frappante.
La devise qui exprimerait le mieux cette conception serait : « Je maintiendrai ». C’est une perspective stoïcienne, qui fait de la volonté le principe de la dignité humaine. A la limite, c’est la vieillesse qui permet le mieux à la volonté de s’affirmer, parce qu’elle la met pour ainsi dire à nu, elle l’isole presque « chimiquement ». Quand on est plus jeune, on ne sait jamais si ce qu’on fait relève de la volonté ou de la vie, de la liberté ou des forces vitales qui s’expriment à travers nous et nous portent. C’est seulement dans la vieillesse que celles-ci devenant de plus en plus faibles, la volonté demeure seule, pour ainsi dire à l’état pur.
Une autre idée émerge de votre texte : c’est l’idée d’exception, de privilège, de condition unique et singulière. De Gaulle était, du moins au début, solitaire – seul contre tous ou presque ; dans le radeau de la méduse tous disparaissent sauf moi qui m’accroche ; dans la révolution « les têtes tombent sauf la mienne ». Ici encore, votre oncle illustre cette idée : miraculé d’un camp de la mort, rescapé d’un accident cardiovasculaire, déglingué mais encore autonome. La vieillesse, en faisant diverger les destins (on n’appartient plus à des collectifs comme lorsqu’on travaille, les amis disparaissent peu à peu, et même la famille s’éloigne ), rend chacun à sa singularité. Les projets sociaux s’effacent, il faut trouver des raisons de vivre qui nous soient propres, comme votre oncle qui cultive ses tomates. Comme vous le dites vous-même en évoquant la tortue, « ça se protège, ça progresse sûrement et ça se fout des autres ». C’est le temps de la réflexion : j’imagine qu’en entretenant son jardin et en vivant seul dans sa petite maison, il a beaucoup de temps pour penser, même s’il n’a pas toujours quelqu’un à qui parler (cf. : « des monuments très beaux et très anciens qui voudraient raconter des histoires, mais il n’y a personne pour les écouter »).
En vous lisant une question me vient : cette volonté obstinée qui caractérise pour vous la vieillesse, est-elle toujours et nécessairement une volonté de vivre ? N’y a-t-il pas un moment où, si les conditions d’existence sont trop dégradées (souffrances, invalidités graves et irrémédiables) elle pourrait, dans un acte « d’ultime liberté », décider de quitter cette vie ? C’était la position des stoïciens : lorsqu’il n’est plus possible de vivre dignement, il faut devancer la mort. Aujourd’hui, vous savez comme moi que cette question est controversée. Votre « portrait » est un hymne à la vie, qui s’obstine à durer et à se maintenir en dépit de tout. Cette obstination est-elle pour vous inconditionnelle ou bien y voyez-vous des limites au-delà desquelles elle se retournerait en son contraire ?
Je vous remercie de votre prompte réponse.
Je suis stupéfaite car mon oncle a effectivement abordé le sujet il y a quelques années. Il m’a parlé de cette liberté qu’il se donnait d’en finir une fois pour toutes lorsqu’il estimerait que les limites du supportable sont atteintes. Il m’a même parlé de « bouillon de 11 heures ». Je n’ai jamais remis la conversation sur le tapis mais je ne suis pas trop inquiète. En effet je sais qu’il a un but dans la vie : son centenaire. D’autre part, les limites ne sont-elles pas faites pour être repoussées ?
Je pense que s’il estime que le moment est venu, ce ne sera pas trop difficile pour lui. Il lui suffira de fermer les yeux et de « lâcher prise ». Ses nombreux « problèmes de tuyauterie » comme il le dit lui-même, auront tôt fait de le rattraper !
Pour l’instant je ne le vois qu’environ une fois par an ( j’habite à 600kms) et je me borne à l’appeler de temps en temps, pas régulièrement (c’est ma pauvre ruse !) pour ne pas donner des habitudes. Souvent le dimanche soir lorsque je ramène ma mère (sa belle-soeur) dans sa maison de retraite. Il peuvent ainsi communiquer. Il me dit alors « Ah, je pensais bien que c’était toi ! »
Il a d’autres contacts sur place, Une amie dix ans plus jeune s’occupe de lui dans le cadre d’une curatelle. Mais dix ans plus jeune ça fait 90 ans. Tout ça est bien lourd pour elle et elle est bien courageuse ! Un jeune retraité l’emmène faire ses courses. Il y a le club des anciens où il prend ses repas tous les jeudis. Il se fait encore des copains à l’épicerie du coin et le bistrot où il va prendre un café tous les jours. La pharmacienne l’invite assez souvent et il me dit qu’elle a enregistré ses mémoires.
Il y a aussi ma fille et son bébé de un an qui s’arrange pour aller le voir de temps en temps.(Le bébé c’est pour lui une grande joie). Elle habite à 800 kms de chez moi, ça ne lui fait que 200 kms pour aller chez son grand-oncle qu’elle adore. Et d’autres nièces encore qui le visitent assez régulièrement.
Voilà à quoi ressemble la vie d’un vieil homme qui a gardé toute sa tête, mais pas tout à fait son corps.
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Merci pour ce témoignage très émouvant.
J’ai déposé les réflexions qu’il m’inspire sur la page « Mourir délibérément » (27 juillet 2015), car elles me paraissent relever spécifiquement de la problématique à laquelle cette page est consacrée.
Si la vieillesse était
Une couleur : Des camaïeux de brun, de gris, de blanc, de bleus … Elles représentent la nature en hiver
Un bruit ou une musique : Une sonate douce. Cette musique est une composition d’instruments de musique de chambre
Un animal : Un perroquet Cet oiseau vit longtemps et sous ces manies et tics de langage répétitifs, il cache une grande intelligence du monde qui l’entoure.
Un lieu ou un paysage : Venise avant le tourisme de masse. La cité respire l’histoire, le patrimoine, le vent du large et la pérennité de son architecture en danger de délabrement.
Un végétal : Un arbre entouré de lierre. L’arbre vit de nombreux cycles de vie et le lierre meurt où il s’attache.
Une personne : grand homme, personne célèbre: Agatha Christie. Son talent de conteuse lui a permis de multiplier à dessein des histoires tragiques ou dramatiques de petites cellules grises
Un métier : Ecrivain L’auteur transmet inlassablement, à travers l’alchimie des mots, des histoires et ouvre les fenêtres existentielles, intellectuelles et affectives de ses lecteurs.
Une œuvre d’art : Une pyramide Qui résiste encore et encore aux outrages du temps
Une période de l’Histoire : Le siècle des Lumières Et de tous les possibles
Un objet : L’horloge ou le sablier Notre temps est compté
Merci
Votre conception de la vieillesse est visiblement celle d’un accomplissement, d’une harmonie qui atteint avec l’âge une sorte de perfection.
La première notion qui me semble revenir sous différentes formes est celle d’équilibre : on la trouve dans les « camaïeux de gris, blanc, bleus », harmonie de couleurs plutôt douces qui caractérisent l’hiver. La sonate, vous le dites vous-même, est une « composition d’instruments » ; Venise est une ville à l’architecture complexe, faite d’édifices – églises, palais, ponts, etc. – qui à la fois sont différents et complémentaires ; l’écrivain agence les mots pour en faire une œuvre où ils s’appellent et se répondent.
La seconde notion qui frappe dans votre portrait est celle de douceur : pour chaque item, vous privilégiez des tonalités estompées (pour les couleurs), des sonorités douces (la sonate). Même Agatha Christie représente, dans le roman policier, un style qui privilégie l’intelligence sur la violence : ses personnages, même lorsqu’ils sont criminels, ne sont pas dans la frénésie ou la véhémence !
Un troisième thème me paraît émerger plus discrètement mais nettement tout de même : c’est celui de la répétition. Le lierre accompagne l’arbre dans ses « cycles de vie » ; le perroquet a « des tics de langages répétitifs ». L’horloge ou le sablier sont aussi des symboles de répétition, d’un temps circulaire (le retour des heures et des jours, le sablier qu’on retourne, etc.)
Enfin, la dernière notion qui transparaît me semble être celle d’intelligence : la sonate, Venise, l’écrivain, et plus encore le siècle des Lumières, expriment l’idée d’une grande culture mise au service d’un raffinement, d’une ingéniosité sans cesse mise à l’épreuve.
Tout cela dessine incontestablement une conception très positive de la vieillesse ! Elle évoque un peu la conception cicéronienne, qui voit dans la vieillesse le triomphe de la pensée sur la force, de la réflexion sur la vigueur, de la culture sur l’impétuosité de la jeunesse.
Cicéron en tirait la conclusion que la vieillesse avait, pour cette raison, une autorité pour ainsi dire naturelle (le Sénat romain était composé de personnes âgées…). La vieillesse, disait-il, n’a pas besoin de la force pour se faire respecter ; elle inspire (ou devrait inspirer) un respect de par sa propre essence. Le respect des anciens était pour lui une marque de civilisation. Pensez-vous de même ?
Par ailleurs, je crois discerner dans votre « portrait », sinon, une contradiction, du moins une certaine tension entre deux aspects. D’un côté la vieillesse signifie pour vous l’atteinte d’une certaine pérennité, à l’image de la pyramide « qui résiste encore et encore aux outrages du temps ». Même s’il y a toujours la mort en fin de compte, la vieillesse aspire à une certaine éternité, et y parvient de par le raffinement de sa culture : l’écrivain (Agatha Christie), le musicien, l’architecte (Venise, les pyramides) créent des œuvres qui survivent pendant des siècles. Mais d’un autre côté, plusieurs de vos propositions évoquent au contraire le temps qui passe et qui dégrade tout : Venise « en danger de délabrement », le lierre qui « meurt où il s’attache », l’horloge qui nous rappelle que « notre temps est compté ».
Comment conciliez-vous ces deux aspects ?
Cette tension entre l’atteinte d’une certaine pérennité et la dégradation du temps qui passe n’est-elle pas la part du jour et de la nuit, de l’ombre et la lumière, du yin et du yang sur le temps de notre vie ? Nos contradictions sont-elles conciliables ? Merci
Un chat car il est indépendant. Son ronronnement me calme.
Une musique : une chanson grivoise de Brassens qui choque le bourgeois.
Une époque : à Florence du temps de Laurent le Magnifique pour le raffinement et la liberté des moeurs.
Le métier de journaliste pour vivre l’actualité.
Une oeuvre d’art : une peinture Jérôme Bosch pour sa vision extraordinaire et mystérieuse de l’enfer .
Votre portrait me semble par plusieurs aspects à l’opposé de celui d’Agnès Larcin. Vous concevez la vieillesse, contrairement à elle, comme une période de provocation, de rupture, de défi allant jusqu’à la dissonance par rapport au monde ambiant.
La chanson de Brassens « choque le bourgeois » ; Laurent le magnifique se caractérise par sa « liberté des mœurs » ; la peinture de Bosch est une peinture violente, qui frappe le spectateur par la force souvent grotesque de ses personnages.
Bref la vieillesse serait pour vous le temps de la transgression, de la libération des tabous et des interdits, l’affranchissement des contraintes sociales et professionnelles qui limitaient et encadraient les âges antérieurs. Même le chat, que vous dites « calme », est un animal « indépendant », qui n’aime pas obéir ou se soumettre à des ordres. Et le journaliste, qui « vit l’actualité » doit pour exercer son métier fureter, aller partout, refuser toute censure et toute limitation dans son droit d’investigation.
Cette liberté un peu provocante de la vieillesse, qui aime choquer, ne serait-elle pas provoquée par l’angoisse de la mort ? Votre dernière image, celle de Bosch peignant l’enfer, semblerait le suggérer. Qu’en pensez-vous ? La liberté de la vieillesse est-elle pour vous une sorte de « chant du cygne », une manière de célébrer la vie avant qu’elle ne finisse, ou bien l’anticipation d’une mort qui inquiète ?
Si la vieillesse était une couleur ce serait le noir parce que c’est une couleur triste.
Si la vieillesse serait une musique ce serait des paroles tristes et noires parce que la vieillesse c’est triste.
Un lieu le désert car c’est la solitude.
Un métier pompe funèbre car la mort approche.
Un animal une souris de laboratoire car on souffre, c’est injuste et on va mourir.
A l’évidence, votre « portrait » est dominé par l’idée de tristesse. Vous le dites vous-même : « La vieillesse c’est triste ».
Votre conception me semble différente à la fois de celle d’Agnès Larcin et de Charles Brandt. Agnès voit la vieillesse comme une sorte d’accomplissement, un équilibre heureux, serein, presque rayonnant (Venise, la musique de chambre, etc.). Charles la voit comme un défi, une libération, presque une jubilation de transgresser tous les interdits auxquels on était soumis autrefois. Vous en revanche, vous n’y voyez qu’un amoindrissement, un déclin, une perte, la chute dans la solitude et la souffrance, en attendant la mort (pompes funèbres).
Comment expliquez-vous cette tonalité très négative ? Y a-t-il des raisons personnelles ou bien s’agit-il d’une conception « philosophique » de l’existence qui vous ferait privilégier la vie dans ses moments de plénitude – l’enfance, la jeunesse, la maturité ?
vert …sagesse
le doux son des cloches autour du cou des vaches en savoie…rassurant calmant
un tigre….il représente la souffrance faite aux animaux
le Mont st Michel…….bonnes ondes
arbre…….rassurant,enveloppant
medecins sans frontiere……humanité
toutes creations d artistes qui viennent du coeur……unique
20 eme siecle…….Tout va trop vite
lunette…….on vit mieux
Votre « portrait » de la vieillesse me paraît tout en contrastes. D’un côté la vieillesse a pour vous un aspect « rassurant » , doux, apaisant. C’est le calme après les agitations de la vie adulte, la sérénité après les inquiétudes de l’existence active, le primat du « cœur » sur l’intelligence, des « créations d’artistes » sur les productions utilitaires.
Ce calme permet la bonté, l’humanité, un regard bienveillant sur les choses et les êtres. On ne peut être bon que lorsqu’on est sans inquiétude, sans besoins, sans soucis majeurs. Bonté et sérénité vont de pair. Les lunettes ne permettent pas seulement de mieux voir, mais de « vivre mieux », c’est-à-dire d’être plus heureux, plus sensible aux « bonnes ondes ».
Mais d’un autre côté, cette bonté rend plus sensible aux souffrances (cf « la souffrance faite aux animaux », ou la référence à médecins sans frontière ) et au stress de la vie moderne (« 20ème siècle : tout va trop vite »). D’où le paradoxe : il faut être serein pour être bon, mais la bonté, en se penchant sur les misères du monde, trouble cette sérénité.
En somme vous semblez-dire : la vieillesse, par la distanciation qu’elle apporte, permet l’accès au bonheur ; mais le bonheur, en permettant de mieux voir la réalité jusque dans ses aspects les plus durs (les misères, les souffrances), nous rend plus vulnérables.
Comment résolvez-vous cette contradiction ?
Si la vieillesse était :
Une couleur : ce serait du bigarré, car c’est varié
Un bruit ou une musique : ce serait Le Boléro de Ravel ,car c’est magnifique,mais il faut couper 3 mn avant la fin !
Un animal :ce serait le chat, car c’est le modèle du Zen
Un lieu ou un paysage : ce serait La vallée de l’Epte,car c’est Mon espace d’enfance
Un végétal : ce serait une pivoine ,car c’est Un miracle de la nature
Une personne (grand homme, personne célèbre…): car ce sont des exemples d’Endurance
Un métier:ce serait Le péripapéticien ,car c’est Faire un bout de chemin avec le Maître
Une œuvre d’art ce serait La Tour Eiffel,car c’est L’apogée de l’ingéniosité française
Une période de l’histoire ce serait La notre ,car Je ne connais les autres que par ouï dire !!!
Un objet ce serait trombonne ,car c’est Simple, astucieux,quasi immortel
une ligne a sauté sur Grand Homme: ce sont mon Père et Ulysse …
Votre « portrait » de la vieillesse me paraît nettement positif.
Loin d’y voir une perte ou un affaiblissement, vous soulignez sa richesse (« c’est varié »), la sérénité qu’elle procure (« modèle du Zen »), la sagesse qu’elle permet d’atteindre (« faire un bout de chemin avec le Maître »), l’ingéniosité qu’elle développe.
Toutefois, vous semblez distinguer la vieillesse elle-même de la fin de vie : en évoquant le boléro de Ravel « qu’il faut couper 3 minutes avant la fin », suggérez-vous que la vieillesse est un état qui est en soi bénéfique, mais qui s’arrête quand commencent des dégradations irrémédiables ?
En vous lisant, deux questions me viennent.
D’une part, vous reliez la vieillesse à « votre espace d’enfance ». Pourquoi ce lien ? En quoi la vieillesse nous rapproche-t-elle de notre enfance ?
D’autre part, vous évoquez la pivoine, qui est « un miracle de la nature ». Pourquoi ce choix ? En quoi la vieillesse peut-elle être considérée comme une sorte de « miracle » ?
Merci ,oui la vieillesse est un processus de vie spécifique ,comme la maturité ,l’adolescence …mais c’est la vie.La fin de vie c’est autre chose ,qui peut (doit )être traitée différemment.
C’est la mémoire qui ramène la vieillesse à l’enfance ,presque naturellement ,les souvenirs et avec un effort ,revisiter l’enfance pour en ré-évaluer la juste valeur :le juste prix payé par ses parents pour nous donner une vie satisfaisante.
Enfin ….le miracle ….y être arrivé, jusque ici ,ce n’est pas le cas de tout le monde ,comme la pivoine surtout celle deChine toute fripée et si belle
Je suis venue sur votre site par hasard car je prend des renseignements dans le but de proposer mes services d aide à la personne âgée , et puis je dois dire que ce petit test m a attiré et j’ai plaisir à lire vos commentaires et ceux des personnes , alors j y vais !!
Couleur le pourpre d’abord pour la couleur du deuil et puis pour la couleur des chakras ..
Musique ce sont les petites notes de piano au début de la chanson de Brel « les vieux »
Animal la tortue , elle me semble bien forte et passer le temps tranquillement
Paysage une grande plaine verdoyante sur les hauteurs
Végétal un lys
Gd homme Jacques Brel c lui qui me fait le plus penser aux personnes âgées dans ses chansons
Métier du bois
Œuvre d art. Statue d un homme et femme entrelacés jusqu’au dernier souffle
Période de l histoire. Guerre 1939 1945 mes grand parent y ont survécu
Objet un verre .. Rempli ..
Merci …
Il me semble que votre « portrait chinois » exprime une vision contrastée de la vieillesse. D’un côté vous y voyez une force (la tortue comme « force tranquille ») associée à des pouvoirs extraordinaires, pour ainsi dire mystiques ou métaphysiques (les chakras). Iraient également dans ce sens positif « la grande plaine verdoyante » (symbole de fécondité), le lys (symbole de pureté), le couple enlacé (symbole d’amour).
Mais d’un autre côté vous y voyez déjà la mort qui s’annonce (« la couleur du deuil ») et une sorte de violence (la guerre 39-45, que vous associez à vos grands-parents).
Peut-être cette ambivalence trouve-t-elle sa meilleure expression dans le personnage et la chanson de Brel, que vous mentionnez à deux reprises. Sa chanson « Les vieux » est à la fois pleine de tendresse, et montre dans la vieillesse une sorte de sagesse au-dessus des agitations du monde. Mais elle est en même temps terrible par son devenir implacable qui rétrécit l’espace (jusqu’au lit) et le tictac glaçant de l’horloge.
En dehors de cette chanson célèbre « Les vieux », qu’est-ce qui, chez Brel, vous fait penser à la vieillesse ? Car sa vie tout entière me semble évoquer plutôt un refus de vieillir : il a arrêté sa carrière bien avant d’être âgé ; il est parti au bout du monde pour ne plus être vu ; et son tabagisme, qui l’a emporté, peut-être considéré comme une volonté inconsciente de mourir jeune, de maladie plutôt que de sénilité.
Par ailleurs, pour le métier, vous indiquez « métiers du bois ». Pouvez-vous préciser la raison de votre choix ? Car tel quel il est un peu énigmatique…
Une couleur : Couleur verte car synonyme de nature, de renouveau.
Un bruit ou une musique : Mozart – Musique du film « Elvira Madigan »
Un animal : Le chien pour sa fidélité et sa gentillesse
Un lieu ou un paysage : Lac avec montagne à l’arrière plan, deux magnifiques éléments de la nature, en principe intemporels
Un végétal : Le coquelicot, note flamboyante dans la nature à l’état sauvage
Une personne (grand homme, personne célèbre…) : Dieu, dont on ne sait s’il est absent ou présent et qui donne lieu à réflexion
Un métier : écrivain, celui qui donne suite à la réflexion, celui qui écrit pour les vivants et les défunts
Une œuvre d’art : Le cri de Munch
Une période de l’histoire : la Renaissance pour ses nombreux artistes
Un objet : un caillou, pour sa solidité.
Merci pour votre réponse et vos commentaires en sorte de mieux me connaître.
Bravo pour votre site !
Il y a dans votre « portrait » plusieurs paradoxes.
L’idée qui me paraît dominer la première partie, c’est que la vieillesse n’est pas, comme on le dit habituellement, le triomphe du temps, l’aboutissement d’un processus d’usure, de dégradation, d’exténuation. Elle est plutôt « hors du temps », comme un arrachement au devenir pour accéder à une sorte d’éternité. Le vert – symbole d’espérance et, comme vous le dites, de la nature – en témoigne, ainsi que la musique de Mozart, qui n’est d’aucun temps. Le caillou, symbole de « solidité », va dans le même sens.
Vous-même parlez des « éléments intemporels » qu’exprime le paysage de montagne. Le thème de la nature revient trois fois dans votre texte, comme si la vieillesse était paradoxalement un symbole de « renouveau » et non d’obsolescence.
Pouvez-vous préciser cette idée et dire qu’est-ce qui, dans la vieillesse, vous semble être générateur de « renouveau » ?
La seconde idée qui domine, surtout dans la deuxième partie, c’est celle de réflexion – le mot revient deux fois. La réflexion paraît liée chez vous à l’existence d’une dualité, d’une alternative, d’un dilemme : Dieu est « présent ou absent » ; l’écrivain écrit « pour les vivants et les défunts » ; et déjà le paysage de montagne était constitué de deux éléments opposés : l’eau (le lac) et la terre (la montagne).
Ici encore, il serait intéressant de préciser ce point. Quelle est la dualité à laquelle s’affronte la vieillesse ? Entre quoi et quoi fait-elle lien ?
Enfin, le troisième thème qui apparaît c’est l’énergie : le coquelicot est « flamboyant » ; le cri de Munch , la Renaissance symbolisent une puissance accumulée qui jaillit soudain.
Ici encore c’est paradoxal : on voit ordinairement dans la vieillesse tout le contraire – l’épuisement, la fatigue l’obsolescence. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?
Bonjour,
Je vous remercie pour le suivi apporté à ma contribution.
A vrai dire, je ne peux, dans l’immédiat, trouver explication à ce paradoxe qui, de fait, apparaît dans les réponses formulées au départ.
Je sais que j’éprouve une crainte à la perspective de vieillir et mourir.
Je pense aussi que la vieillesse est synonyme de cette sagesse qui m’a peut-être manqué et qu’elle serait donc un renouveau, un autre départ, assorti d’une volonté de reculer l’échéance.
Je vais réfléchir et revenir vers vous.
A bientôt donc,
Corinne.
Si la vieillesse était une couleur,ce serait un pastel parce qu’il est synonyme de douceur.
Si la vieillesse était un bruit, ce serait le tic tac de la pendule parce qu’il me rappelle la chanson de J.Brel « Les Vieux »
Si la vieillesse état un animal, ce serait la hérissonne parce que le hérisson était sensé protéger les morts.
Si la vieillesse était un lieu, ce serait un square parce que les anciens se retrouvent sur les bancs
Si la vieillesse était un végétal, ce serait le lierre parce qu’il s’accroche comme la vieillesse se cramponne à la vie
Si la vieillesse était une personne célèbre, ce serait Pierre Dac parce qu’il a dit:ce qui est bien avec la maladie d’Alzheimer c’est qu’on rencontre des gens nouveaux tous les jours
Si la vieillesse était un métier, ce serait chercheuse pour parvenir à vaincre les maladies qui détruisent la qualité de la vieillesse
Si la vieillesse était une oeuvre d’art, ce serait l’école d’Athènes de Raphaël la
vieillesse y apparaît de façon valorisante
Si la vieillesse était une période d’histoire, ce serait les 30 glorieuses parce que même vieux il faisait bon vivre cette période de paix et d’expansion continue
Si la vieillesse était un objet, ce serait un livre une BD de Pascal Rabaté « les petits ruisseaux » qui traite de la vieillesse de façon pas triste du tout
Votre « portrait » de la vieillesse est incontestablement positif. Toutes les lignes soulignent des traits plutôt heureux ; rien ne vient indiquer un manque, une frustration ou une souffrance. D’ailleurs, vous-même parlez de la « qualité de la vieillesse », expression assez rare pour être soulignée ! Seule l’allusion aux maladies tempère cette positivité, mais vous suggérez tout de suite qu’elles peuvent être vaincues.
L’un des traits dominants que vous attribuez à la vieillesse me semble être la ténacité. C’est le cas du lierre, qui s’attache obstinément à son support ; mais aussi du hérisson, du chercheur qui fait preuve de patience pour arriver à des découvertes, et même de Pierre Dac, qui fut à Londres le symbole de la résistance française.
Mais cette ténacité n’a rien de laborieux ni de violent. Elle est tranquille, douce comme la couleur pastel que vous évoquez en commençant, ou comme le tic tac de la pendule qui scande régulièrement le temps.
Votre « portrait » semble ainsi tourné davantage vers le passé, la nostalgie d’un âge d’or révolu (les 30 glorieuses), la recherche d’un état protégé, abrité des vicissitudes de la vie. On se demande, en le lisant, comment la vieillesse peut avoir une « qualité », apparaître sous un aspect « valorisant », alors que presque toutes vos propositions évoquent une existence amortie, ténue, limitée à un minimum d’échanges et de mouvements ( les vieux qui sont sur les bancs d’un square).
N’y a-t-il pas une certaine contradiction entre cette vision « minimaliste » de la vieillesse et l’éloge que vous en faites ?
Merci pour votre réponse.
Les contradictions évidentes qui apparaissent dans « mon portrait chinois de la vieillesse » m’amènent à ces remarques :
D’abord sur la qualité de la vieillesse :
Vouloir transmettre son savoir (être ou faire), son expérience(heureuse et malheureuse) sous des formes anciennes comme dans « l’école d’Athènes » ou de nos jours par internet est une constante de la qualité de la vieillesse.
Ensuite sur l’aspect valorisant :
Etre le témoin vivant d’une époque est indispensable pour les générations futures.
Les avancées, quel qu’en soit le domaine se font à partir de fondements dont la vieillesse est la représentante.
Si la vieillesse était :
Une couleur ce serait le gris, pour les cheveux et la solitude.
Un bruit ou une musique ce serait une prote qui grince, ca fonctionne encore mais pas aussi bien qu’avant.
Un animal, ce serait le hibou.
Un lieu ou un paysage, ce serait une banlieue pavillonaire. Calme, accessible et en périphérie.
Un végétal, ce serait un fruit d’automne, un marron peut-être.
Une personne ce serait le pape.
Un métier ce serait le brocanteur. Attaché aux objets et évenements du passé.
Une œuvre d’art, les montres molles de Dali.
Une période de l’histoire, Aujourd’hui, car elle est plus présente que jamais.
Un objet, le sonotone.
Votre portrait est dans l’ensemble plutôt conforme à l’image qu’on se fait de la vieillesse. Le gris, la porte qui grince, le sonotone expriment l’idée d’un état assez triste, où les choses se déglinguent, tout comme le brocanteur « attaché aux objets du passé ».
Mais d’autres propositions sont plus positives. La banlieue pavillonnaire n’est certes pas très exaltante, mais vous avez bien lié le calme et la position périphérique. En revanche, je ne suis pas sûr qu’elle soit toujours facilement accessible !
Enfin, certains choix sont carrément surprenants. Pourquoi le pape ? Est-ce parce qu’il représente l’autorité et la sagesse, du moins dans le domaine spirituel ? Mais dans votre autre contribution, vous dites que les seniors n’incarnent plus le savoir ni la compétence, et n’apportent plus de réponses satisfaisantes aux jeunes. Comment conciliez-vous ces deux affirmations ?
Et pourquoi les montres molles de Dali ? Pour celui-ci, c’était une provocation, un paradoxe, une manière de surprendre le spectateur. Pouvez-vous expliquer ce choix ?
Je ne comprends pas bien non plus votre choix de la période d’aujourd’hui, « plus présente que jamais ». Que voulez-vous dire par là et en quoi la vieillesse est-elle « présente » aujourd’hui plus qu’autrefois ?
Bonjour,
Le pape est une personnalité âgée. Non seulement les différents papes sont des seniors mais l’existence du pape remonte au 1er siecle. En ajoutant son rôle spirituel, je trouve que c’est un personnage qui représente bien la vieillesse.
Les montres de Dali est en effet surprenant. Je trouve qu’avec l’âge la notion du temps change voir se déforme. Avec la retraite, les rythmes quotidien et hebdomadaire changent. En parallèle, l’approche prévisible des problèmes de santé, voir de la mort, permet d’apprécier et d’utiliser différemment le temps.
Pour la période de l’histoire, j’ai choisis aujourd’hui. Car la proportion des seniors dans la société actuelle est forte. Ce qui pose plus que jamais des questions par rapport au vieillissement de la population et de ces conséquences. Et la durée de vie n’a jamais été plus élevé.
J’espère que ces détails clarifieront mes choix.
A bientôt
Ce que vous dites de le l’altération du temps avec le vieillissement est tout à fait juste. Dans les ateliers que j’anime sur ce thème, beaucoup de seniors disent qu’avec la retraite ils passent d’un temps objectif, organisé et scandé par des contraintes objectives ( se rendre et revenir du travail, conduire et aller chercher les enfants à l’école, faire les courses, travailler en semaine et se reposer le week-end) à un temps beaucoup plus flou, subjectif, dépendant des envies et des humeurs du moment plutôt que de règles sociales. On peut se reposer en semaine et travailler comme un fou le dimanche, ou partir se promener quand les actifs bossent, etc.
D’où, en effet, l’idée que le temps devient « mou » comme les montres de Dali. Mais cette mollesse n’est-elle pas un piège ? Ne conduit-elle pas à une démission, un retrait des liens sociaux, une marginalité sans retour ?
Beaucoup de personnes âgées s’imposent spontanément des contraintes pour garder un temps qui ressemble à celui des âges antérieurs. Elles participent à des associations qui imposent un calendrier, des activités à heures fixes ; ou elles s’engagent dans des mandats locaux qui eux aussi sont générateurs de contraintes.
Que pensez-vous de cette attitude ? Est-ce un « réflexe de survie », un effort salutaire pour ne pas sombrer dans le laisser-aller, la nonchalance, l’indifférence – ou bien au contraire une aliénation, l’incapacité de s’affranchir des règles et contraintes du travail ?
Pour ce qui est de la période actuelle, vous avez raison de dire qu’elle se caractérise par une forte proportion de personnes âgées. Certains sociologues parlent de « pouvoir gris ». Mais ici encore, n’est-ce pas un trompe-l’œil ? D’une part l’âge de la retraite recule, donc les futurs « vieux » vont travailler plus longtemps. D’autre par on incite les seniors à rester jeunes, à se conduire comme des jeunes, à participer aux activités de la société – donc à nier ou minimiser leur vieillesse. Et quand enfin on la reconnaît, c’est qu’on est au bout du rouleau, dépendant, assisté de multiples manières !
On pourrait du coup se demander si la vieillesse existe vraiment ! En effet, soit elle est éludée (tant qu’on le peut), soit elle se réduit à la dépendance et l’assistance (dans les états de dégradation extrême : Alzheimer, etc.), c’est-à-dire à quelque chose qui ne relève plus de la vieillesse, mais de la maladie.
Je pense que la flexibilité de la retraite est une force dont on se doit de profiter. Cette disparition de la contrainte du temps ouvre à une certaine liberté. Le choix de conserver un rythme de vie, avec une volonté de rester actif est un choix libre et personnel. Il en va de même pour la décision de se libérer des contraintes de temps afin de décider et définir son propre nouveau rythme de vie.
Je dirais que celui qui conserve le calendrier choisis de vivre libre parmi les autres. Alors que celui qui refuse le calendrier choisis de vivre libéré des autres.
Pour le premier, je ne parlerais pas d’aliénation. Je comparerais plus cette incapacité à changer de rythme au travailleur de nuit, qui veille la nuit et dors toute la matinée, même en vacance… Cela durera aussi longtemps que s’on organisme le décidera + le temps qu’il le choisira.
Pour le second, je ne dirais pas non-plus que c’est une démission et un retrait de la vie social. C’est un choix de liberté plus absolu mais cela lui permet de participer à des événements ponctuelles, de choisir des événements saisonniers ou exceptionnels comme nouveau rythme de vie.
C’est comme partir en vacance en Bretagne, dans un bungalow ou en camping-car. Le chauffeur de camping-car semble dans l’absolu plus libre, mais au final, il se retrouve les deux à visiter le Mont saint-Michel et à aller tremper les pieds dans l’eau sur une plage…
PS : Désolé pour la comparaison des vacances. J’espère que cela illustre correctement ma penser et non le contraire.
Vert
Une source d eau
Chat
Toscane
Saule pleureur
De galle
Saboter
Le cri d Édouard Munich
Lunette
Votre portrait » de la vieillesse est un peu énigmatique du fait que vous ne donnez pas les raisons de vos choix.
Il se dégage néanmoins de vos premières propositions une tonalité plutôt positive et dynamique. Le vert est la couleur de l’espérance »; la source d’eau est un jaillissement et un principe de vie; le chat est un animal agile et vif. Tout cela suggère que la vieillesse serait plutôt pour vous un commencement, le départ d’une nouvelle période de l’existence où tout est à réinventer.
Cependant, la seconde partie de votre portrait est moins positive. La Toscane est une province italienne qui évoque le calme et la sérénité de paysages et de monuments séculaires. La saule pleureur est un arbre plutôt mélancolique.
Enfin, la dernière partie est carrément catastrophique. Le sabotage et le cri de Munch suggèrent la violence et l’angoisse. Même les lunettes renvoient à un manque, une infirmité, une déficience croissante.
Comment conciliez-vous ces trois aspects ?
.
Pour moi, si la vieillesse était…
Un métier.
Ce serait Philosophe (même si c’est plus qu’un métier), car la vieillesse, comme la philosophie, est une promesse non pas de bonheur, mais de lucidité, lucidité qui n’exclut pas les instants de bonheur, mais les reconnaît simplement comme une composante de la vie. Rien de plus, mais rien de moins.
Un lieu.
Ce serait celui que contemple le personnage du tableau de Caspar David Friedrich « Voyageur contemplant une mer de nuages », pour ce qu’il évoque de lumière, distance, romantisme, sérénité (l’attitude de cet homme), mais aussi l’incongruité de ses vêtements bourgeois dans cet environnement qu’on peut facilement imaginer dangereux.
Une œuvre d’art.
Ce serait la « Femme au béret rouge » de Picasso, pour son contraste entre les magnifiques couleurs du tableau (la vie éclatante) et la tristesse exprimée par le visage féminin.
Personne célèbre.
Ce serait Stéphane Hessel, car c’est comme cela que j’aimerais vieillir (c’est plus un idéal pour moi qu’une réalité).
Couleur.
Ce serait « Terre de Sienne brûlée », dont le beau nom évoque à la fois la vie (c’est une belle couleur chaude) et la mort : la terre où l’on est enterré, mais aussi la terre brûlée d’où toute végétation a disparu, avant qu’elle ne repousse. Finalement, c’est peut-être l’espoir.
Musique.
Ce serait « The parting glass », chanson irlandaise émouvante et euphorique à la fois, chantée par Sean Davey dans le film « Waking Ned Devine ». C’est une chanson qui célèbre tout ensemble la joie partagée en souvenir du défunt, et la réalité de la disparition irrémédiable d’un ami cher.
Merci pour votre site, à bientôt de vous lire.
Serge Gautier
Bonjour,
Votre choix de « Philosophe » comme métier rejoint les discours de plusieurs auteurs, comme Epicure et Montaigne. Ils disent que l’enfance et la vieillesse sont les deux âges privilégiés pour philosopher. L’enfance, parce que l’enfant découvre la vie avec un étonnement et une innocence qui caractérise l’attitude philosophique ; la vieillesse parce qu’elle est dégagée des préoccupations pratiques et des soucis de l’âge adulte, et que la proximité de la mort l’incline à privilégier l’essentiel et à négliger le reste. Reste à savoir si la vieillesse suffit, à elle seule, à procurer la « lucidité » dont vous parlez ! Les malaises et maladies qui la caractérisent peuvent engendrer l’inverse…
J’aime beaucoup le tableau de Friedrich, et comme vous je suis frappé par le contraste entre la tenue « bourgeoise » du promeneur et la sauvagerie du paysage. Cela pourrait signifier qu’on est toujours dépassé par sa vieillesse, on la vit toujours en-dessous de ce qu’elle exige ou implique, parce qu’on n’est jamais « purement vieux ». Comme le dit Victor Hugo, on garde en soi les âges antérieurs, avec leurs préoccupations sordides ou dérisoires.
Le choix de la « Femme au béret rouge » irait dans le même sens : le caractère déstructuré du visage, avec cet œil immense par rapport à l’autre, donne une impression de déséquilibre qui peut évoquer la vieillesse.
Vous avez raison de dire que Stéphane Hessel est plus un idéal qu’une réalité : celui de quelqu’un qui est resté lucide et debout jusqu’à la fin, sans aucune dégradation. Mais justement, n’était-il pas presque trop parfait pour constituer un modèle ?
Tous vos choix me semblent exprimer l’ambivalence de la vieillesse : elle est à la fois une chance ( de lucidité, de sagesse, d’espoir) et un risque (de déclin, de lâcheté, d’abandon ou de démission).
Pensez-vous que cette ambivalence vaut pour tout le monde ? Ou bien y a-t-il une part de hasard dans le fait que certains ont des vieillesses plus « heureuses » ( ou moins malheureuses) que d’autres ? Simone de Beauvoir dit quelque part que la manière dont on vieillit reflète la façon dont on a vécu toute sa vie ; en quelque sorte, on aurait la vieillesse qu’on mérite. Etes-vous d’accord avec cette position ?
Bien cordialement
François Galichet
Bonjour,
Merci pour votre réponse. Elle m’incite à poursuivre plus loin mes réflexions.
Je ne pense pas que la vieillesse soit dégagée des soucis de l’âge adulte, dans la mesure où les rêves qu’on n’a pas réalisés, ou nos échecs, subsistent comme regrets plus ou moins tenaces, ou comme nostalgie du temps où tout était encore possible. Je ne sais pas si on peut définir ce qui serait une vraie sagesse, mais il me semble qu’elle est perceptible par ses effets : elle procure un apaisement véritable. Plus jeune (j’ai maintenant 69 ans), on me trouvait philosophe, ou sage, alors que je me considérais très ignorant et « incomplet », ce que m’ont confirmé beaucoup d’épreuves par la suite.
Donc la vieillesse est peut-être le temps de l’apprentissage d’une sagesse mature, plus que de la lucidité finalement. La lucidité peut s’accompagner de souffrance. J’en déduis que la sagesse comporte une dimension que la lucidité n’a pas : elle fait appel aux affects et à l’émotionnel, au corps et aux rapports humains ( du moins c’est l’expérience que j’en ai ), alors que la lucidité est plus proche de l’intellect . Je n’ai cessé depuis longtemps de vouloir comprendre (ce qui tend vers la lucidité), et en même temps j’ai toujours eu besoin d’apaisement (ce qui tendrait vers la sagesse selon moi).
Sagesse et lucidité me semblent finalement indissociables, bien qu’elles tendent vers deux directions souvent contradictoires, entraînant le déséquilibre dont vous parlez. Ce déséquilibre est surtout pour moi quelque chose de vital plus qu’un problème en soi : pour marcher, ou avancer dans la vie, il est indispensable de se projeter, donc de perdre, au moins momentanément, l’équilibre.
Je me demande si la philosophie s’est penchée sur la question de savoir comment on peut distinguer sagesse et lucidité, en même temps que chercher à comprendre leurs rapports.
Pour répondre à votre dernière question, je dirais que « on a la vieillesse qu’on mérite » peut s’interpréter de deux façons. Elle peut refléter un volontarisme bien dans l’air de notre temps, ce qu’on appelle la pensée positive, valoriser le courage : on se fait soi-même. Ou bien dire la même chose que « on a le sort qu’on mérite », ce qui s’apparenterait à une punition pour avoir mal géré sa vie, et accepter son destin, ce qui est l’exact contraire de la proposition précédente. Cette déclaration, comme toute déclaration de portée générale, ne dit rien sur toute vie personnelle, et je trouve qu’elle est assez « binaire » : une chose est soit vraie soit fausse, dans la vie il y a les gagnants et les perdants etc. Si c’est cela que voulait dire Beauvoir, je ne suis pas d’accord, cette pensée semble s’enfermer dans les définitions, elle est trop simple pour être vraie et porte des jugements définitifs. Pour savoir qui sont les gagnants et qui sont les perdants, il faut se demander quels sont les critères à partir desquels on définit la réussite et l’échec, une bonne vie et une vie ratée etc. Et ces critères sont soit les critères dominants dans une société donnée, soit des critères personnels. Opposition bien utile pour y voir clair. Mais si l’on veut avancer, il faut sans doute sortir de la dualité, et accepter la complexité. Ce n’est pas si facile d’ailleurs, et Edgar Morin lui-même n’est pas toujours clair à ce sujet…
J’arrête ici mes réflexions pour ce soir, en espérant avoir été clair moi-même…
Bien cordialement
Serge Gautier
Après avoir lu et apprécié votre livre, je fais l’exercice « Portrait chinois », j’aimerais votre analyse :
Couleur : le bleu, le bleu de l’univers, à l’infini
Bruit : le vent : on ne le voit pas, mais on le sent ; il est partout, doux, fort, frais, froid,
Animal : papillon : léger, qui s’envole et disparaît sans bruit,
Paysage : le Grand Canyon : traverse le temps, reste beau et vivant,
Végétal : arbre : un olivier, pour sa longévité,
Une personne : Darwin, la loi de la nature,
Objet : allumettes : par le feu, partir en fumée, retour à la nature notre mère universelle !
Votre « portrait chinois » de la vieillesse me semble dominé par les valeurs de légèreté, d’immensité et de transparence. Le bleu, comme vous le dites vous-même, évoque l’infini (de l’océan, de l’univers). Le vent, comme le papillon, suggèrent des réalités impalpables, impossibles à saisir ou à tenir. Le Grand Canyon et l’olivier sont associés à une certaine forme d’éternité ou de longévité.
Si bien qu’en vous lisant j’en viens à me demander si vous faites le portrait de la vieillesse ou de son contraire ! La vieillesse est en effet habituellement associée à tout le contraire : la maladie, les infirmités, c’est-à-dire le poids de plus en plus lourd des besoins et des servitudes liées à la satisfaction des besoins vitaux.
Ce paradoxe pourrait s’expliquer par le fait que pour vous vieillir ce serait perdre la lourdeur et l’épaisseur qui caractérisent l’âge adulte, avec ses préoccupations pratiques, matérielles, réalistes. En vieillissant on abandonnerait ces soucis matériels pour ce qui permet de perpétuer la vie ; on s’allègerait, on se libèrerait de tout ce qui est pesant pour devenir de plus en plus diaphane, évanescent. La mort serait l’aboutissement ultime de ce processus (« partir en fumée » et « retour à la nature »).
Cette philosophie est-elle la vôtre ? Si c’est le cas, elle me semble très proche des spiritualités orientales, notamment bouddhistes.
Mais ne vaut-elle pas seulement si on est en bonne santé ? Peut-on garder cette philosophie si on est accablé par les misères qui accablent certaines vieillesses ?
Un choix m’intrigue : c’est celui de Darwin, que vous associez à « la loi de la nature ». Or si je ne me trompe, Darwin est le théoricien de la sélection naturelle, de la concurrence entre les espèces, de la lutte pour la survie. Cela ne me semble pas très bien cadre avec vos autres choix. Qu’en pensez-vous ?
Merci pour votre analyse … effectivement ma philosophie sur le vieillissement s’inspirent des certaines spiritualités ; sans doute aussi lié au fait d’être en bonne santé. Cependant et aussi paradoxal que cela puisse paraître, il me semble « que notre sort », « notre destin », « du début à la fin » est inscrit dans nos gènes et celui de notre ascendance ? C’était en ce sens que je parlais de « la loi de la nature », il me semble que chaque individu a sa part de sélection naturelle ?
Et vous avez bien raison d’évoquer les misères qui accablent certaines vieillesses. J’ai vécu de près la vieillesse de ma mère et toutes les difficultés de perte d’autonomie qu’elle a subies et qui -pour la plupart étaient dues à son handicap de naissance- mais pas que. Elle a souffert psychologiquement, physiquement, tout en conservant, un regard lumineux à chaque jour qui la conduisait vers sa fin … Elle voulait « partir dans la dignité » disait-elle, comme elle a vécu, modestement mais digne. Elle nous a quittés à 95 ans, 4 mois et 13 jours … au petit matin d’un vendredi 13, son chiffre, dans son lit, avec son intime secret d’en avoir -j’y pense toujours- décidé seule d’accepter le terme de sa longue Vie … dans ce monde !
Vous suggérez dans votre contribution que décider librement de sa mort pourrait aider à accepter les misères qui nous accablent dans la vieillesse. Les réponses à un questionnaire diffusé dans l’association « Ultime Liberté » à laquelle je participe confirment votre analyse. Les personnes qui ont acquis (par des voies que je ne dirai pas ici) les moyens de quitter librement la vie quand elles l’estiment juste déclarent toutes que depuis lors elles vivent mieux, plus sereinement, plus joyeusement. Si, comme le dit Spinoza et bien d’autres philosophes, la liberté est la condition du bonheur, alors cette liberté doit s’étendre jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à la faculté de choisir le moment de sa mort. Mais c’est vrai que c’est un « intime secret » qui ne peut pas être partagé avec d’autres, car chacun est seul à pouvoir juger de l’opportunité de l’instant.
Bien cordialement,
F.G
Arc en ciel pour sa pluralité, un si parce que c’est une bonne note et presque une condition, un dromadaire pour sa résistance à la soif, une île au milieu d’un lac parce que c’est très propice au rêve, un arbre fruitier en fleur pour la même raison que l’île au milieu d’un lac, une femme inconnue parce que je la préfère au soldat inconnu, pourvoyeur de joie, la femme qui marche de Giacometti , les années 2020 et enfin une clé.
Bonjour,
Votre « portrait chinois » me paraît exprimer une vision résolument optimiste et volontariste de la vieillesse. L’arc en ciel, qui évoque « la pluralité », me rappelle cette remarque de Victor Hugo : « Etre vieux, c’est avoir tous les âges ».
Le dromadaire qui « résiste à la soif » fait écho à ce passage de François Nourrissier dans Le gardien des nuits : « Il découvrait que les familles, les maisons aux façades silencieuses, abritent des héros : ces ancêtres souriants, légers, encore tournés vers autrui et qui ne se plaignent pas ».
Vous associez la vieillesse au rêve (l’île, l’arbre fruitier) : pourquoi ? Est-ce parce que c’est le temps d’une moindre activité, de moindres capacités à agir dans le monde, donc d’adopter une attitude plus contemplative à l’égard du monde, et plus introspective à l’égard de soi-même ?
En revanche certains de vos choix sont trop elliptiques pour qu’on puisse en saisir la signification. Pourquoi le « si » est-il « une bonne note » ? Pourquoi « la femme qui marche » de Giacometti plutôt que, par exemple, le Penseur de Rodin, qui irait bien avec votre association de la vieillesse au rêve ? Et pourquoi enfin la clé ? Sur quoi ouvre-t-elle ?
je vous découvre par l’intermédiaire d’UL.
couleur :le gris , je pense aux vieilles de mon enfance toutes habillées du même tablier gris
bruit ou musique: l’harmonium de l’église de mon village . l’odeur de vieille poussière de l’harmonium
animal: dinosaure; on peut pas faire mieux
lieu ou paysage:un sentier ombragé avec plein de feuilles mortes. pour la sérénité, le calme, le chemin qui continue mais qui a un bout;
végétal:une branche de lilas blanc: je suis toujours ému lorsque j’en vois.
une personne: Franco . Un dictateur assassin qui à mis des années à mourir, quel manque de dignité
métier :un berger avec une grande houppelande, un grand chapeau et un grand bâton. souvenir d’un tableau .
Une œuvre d’art:une sculpture de glace. froid et si fragile
période de l’histoire: début du xx eme. c’est encore vieux avant c’est la préhistoire
objet: Un blaireau avec sa coupe pleine de mousse ,un rasoir couteau et la lanière de cuir pour l’aiguiser. Mon grand père.
Bonjour,
Beaucoup de vos choix prennent la forme d’une redondance : le thème de la vieillesse vous inspire des images de vieilles femmes, d’un vieil harmonium, de « vieille poussière, etc.
Mais ces images s’allient à un autre thème, celui du calme, de la sérénité, du cheminement tranquille, de la pureté (le lilas blanc), d’une attitude contemplative (le berger avec sa grande houppelande).
En vous lisant, je me demande si en fin de compte ce n’est pas le thème de la nostalgie qui est dominant dans ces choix. La vieillesse semble liée pour vous non pas à la décrépitude ou au déclin, comme c’est le cas pour beaucoup, mais à la nostalgie, au retour à l’enfance ou à une période révolue (le blaireau de votre grand père, qui n’est plus guère utilisé aujourd’hui !).
Bref, il me semble que vous voyez la vieillesse, non à travers la vôtre propre, mais plutôt à travers les personnes âgées que vous avez côtoyées pendant votre enfance ou les objets (harmonium, tableau) qui vous ont marqué.
Par rapport à ce thème dominant de la nostalgie, votre choix de Franco détonne un peu, parce qu’il apporte une note contraire : l’indignité, le mépris des valeurs humaines, la violence, etc. Il en va de même de la « sculpture de glace », qui exprime une froideur et une insensibilité à l’opposé de la nostalgie et de la tendresse de vos autres choix !
Comment expliquez-vous ce contraste ?
Je découvre, je commence par votre portrait, j’ai envie de creuser le sujet, vaste et intéressant de cette étape de la vie…
Une couleur : le noir, car elle reste pour moi un couleur de lumière et met en valeur les peaux translucides
Un bruit : le souffle, car il nous faut parfois tendre l’oreille pour entendre les voix des personnes qui sont veilles, encore plus dans notre société actuelle.
Un paysage : un lac gelé, mélange d’une grande force et d’une extrême fragilité
Un personnage célèbre : Soeur Emmanuelle pour avoir traversé les âges en gardant cette force incroyable.
un métier : Charpentier, pour la patience, la lenteur du mouvement, la beauté de faire naître des objets à transmettre…
Merci de votre retour, je vais continuer à m’attarder encore ici.
Votre « portrait chinois » me semble marqué par l’idée de contraste.
Presque toutes vos propositions reposent en effet sur des oppositions en forme d’oxymores :
– le noir qui permet de mettre en valeur la lumière
– le souffle qui incite à tendre l’oreille pour mieux entendre
– le lac gelé, qui fait du liquide une substance dure et résistante
– Sœur Emmanuelle, d’apparence fragile, mais qui recèle en elle une « force incroyable »
Vous suggérez ainsi que la vieillesse se caractérise par un divorce, un décalage entre l’apparence et la réalité. Alors que dans les âges précédents de la vie les deux coïncident grosso modo – sauf cas particuliers comme le mensonge – la fin de la vie les ferait diverger irrémédiablement. Etre vieux, ce serait pour vous ne pas être ce que l’on paraît, ou ne pas paraître ce que l’on est : usé alors qu’on est plein d’énergie intérieure, fragile alors qu’on se sent fort, triste alors qu’on vit une joie intérieure, malheureux alors qu’on est heureux… ou l’inverse. Est-ce ce que vous éprouvez personnellement ?
Votre dernière proposition est intéressante, car elle rapproche la vieillesse de l’artisanat (le charpentier). De même que l’artisan se distingue et s’oppose au travail industriel par sa lenteur, sa patience, sa modestie qui seules permettent de faire surgir « la beauté », de même la vieillesse serait en quelque sorte, dans la vie, comme le passage de l’industrie à l’artisanat. Le souci principal ne serait plus l’efficacité ou la productivité, mais la beauté. La vieillesse serait ainsi pour vous le stade « esthétique » de la vie, tout comme l’art est la libération de toutes les contraintes du besoin et de l’action pour accéder à une attitude purement contemplative.
Ici encore, cela correspond-il à une expérience personnelle ? Ou bien s’agit-il d’une vision un peu idéalisée et rêvée de ce que devrait être la vieillesse – mais qu’elle n’est pas toujours…?
Bonjour,
Merci d’avoir pris le temps de restituer une vision de mon « portrait chinois » de la vieillesse.
Le contraste effectivement est présent, je crois que de cette façon j’ai voulu souligner la force et la fragilité qui sont présentent tout au long de notre vie, à tous les âges y compris à ce moment là. Pas pour en faire un « divorce » à cet âge.
Un proverbe dit : « quand un vieillard meurt c’est une bibliothèque qui brûle »
Un autre nous dit « vieillir c’est pas pour les mauviettes »
J’ai 49 ans, il me semble que la vision de la vieillesse à changé A quel âge est t’on vraiment vieux ?
Ce n’est plus maintenant la perte de son travail, puisque les occupations se multiplient encore plus à l’âge de la retraite et bien après…
Autour de nous certains repères ont changé, il y a un moment ou l’on se demande si l’on va devenir des jeunes vieux, ou des vieux jeunes…
Oui la partie où vous évoquez l’aspect contemplatif me paraît correspondre à ce que j’aimerai, une vision certainement idéalisée, vieillir est aussi une chance que nous donne la vie, le prix à payer pour ne pas qu’elle s’arrête trop vite, à nous de trouver les clefs pour un certain équilibre avec tout ce que cela comporte de changement, de perte, d’adaptation, mais c’est finalement le principe même de toute une vie….
Je vous souhaite une belle journée
Nathalie
Bonjour,
La couleur: j’hésite entre le noir et le blanc la première renvoie à la mort et la seconde à la sagesse. Il y a un lien possible entre les deux…à creuser.
Le paysage: je vois un espace vaste avec des montagnes et une plateau, il y a des prés et des forêts. cela me rappelle la liberté de l’âge et la fécondité d’une vie longue.
Le personnage: Marie, mère de Jésus et pourtant je ne suis plus chrétien mais c’est ce qui vient. Je retrouve la vastitude, de l’amour, de la patience…
L’oeuvre d’art: un tableau marin d’Emil Nolde, profondeur de l’étendue marine et de la couleur verte. Vieillir comme un retour vers plus large que soi?
L’objet: le banc de pierre contre la maison. Besoin de repos, de chaleur, de ne rien faire de particulier, divaguer ou contempler…
Le son: le vent du printemps qui agite doucement les branches, tout passe et moi aussi, ce n’est pas grave non plus!
Le métier: le métier d’homme comme dit Alexandre Jollien. Je suis vieux je ne sers plus à rien, je suis un simple humain, j’ai le temps et plus rien à prouver sur ma valeur professionnelle et sociale.
Christian
Bonjour,
Vous expliquez déjà fort bien vos choix, et je n’ai pas grand-chose à ajouter !
Le lien que vous pressentez entre le blanc et le noir peut se justifier si l’on considère que dans certains pays comme le Japon, le blanc est la couleur du deuil (alors que chez nous c’est la couleur du mariage, c’est-à-dire de la vie !) et que réciproquement le noir dans la peinture de Soulages n’est nullement triste.
Ce qui surprend dans votre « portrait », c’est qu’habituellement la vieillesse est associée à un rétrécissement, une diminution (des capacités, des déplacements, de la vision, etc.). Or vous y voyez le contraire : un agrandissement (« espace vaste »). Cela me rappelle la phrase de Victor Hugo : « Etre vieux c’est avoir tous les âges ». Avancer en âge, ce n’est pas perdre les âges précédents mais au contraire les capitaliser, ou plutôt les mutualiser, voir chacun d’eux (enfance, jeunesse, maturité) à travers tous les autres – donc multiplier les points de vue.
Votre choix de Marie peut aussi surprendre, car habituellement on ne la voit pas vieille. Ici encore, c’est peut-être, comme vous dites, « la vastitude de son amour» qui la vieillit – mais aussi l’importance démesurée de ce qu’elle a vécu. Ne pourrait-on penser que vivre une vie intense et grosse d’événements marquants vaut largement une vie plus longue mais moins riche de significations?
Je ne connais pas Emil Nolde mais le thème de la mer est associé avec l’idée d’immensité et de communion cosmique. Le thème du vent va dans le même sens. En revanche, le banc de pierre suggère plutôt l’idée d’un bonheur modeste et familier, d’un repos sans rien de mystique : on se chauffe au soleil comme le chat qui dort près du feu…Vous semblez ainsi suggérer que la vieillesse oscille entre une tendance « mystique » que la proximité de la mort favorise, et une tendance « prosaïque » auquel le rétrécissement de l’horizon et des ambitions incline.
Quant au métier, je suis d’accord avec vous que la vieillesse nous détache de toute considération utilitariste : on ne sert plus à rien et on n’a plus besoin de grand-chose…
Merci encore de ce « portrait » tout en nuances et plein de poésie. Je vous souhaite de vivre dans votre existence réelle ce que vous écrivez dans votre portrait ; mais à vous lire, je n’en doute pas !
Bien cordialement,
François Galichet
La couleur : le jaune, en plus d’être ma couleur préférée, le jaune prend la lumière et renvoie de la lumière.
Un animal : un oiseau, l’oiseau est le symbole de la liberté
Un lieu ou un paysage : une forêt, j’aime la forêt parce qu’elle est généreuse et protectrice;
Un végétal : une fleur des champs parce qu’elle revient chaque printemps et nourrit les abeilles et est belle.
Un personnage : Lao Tseu pour la sagesse et l’éveil
Un métier : Médecin pour soigner
Un bruit ou une musique : Le chant du merle
Une œuvre d’art : un livre, le petit prince de St Saint-Exupéry une, parmi les plus belles histoires
Une période de l’histoire : la préhistoire parce qu’il y avait tout à apprendre
Un objet : une boussole pour trouver son chemin.
Je suis frappé à quel point le thème de la connaissance et de l’apprentissage domine dans vos choix. Le jaune « prend » la lumière, donc la reçoit comme un enrichissement – pour la redonner. Lao Tseu est un sage qui apprend et enseigne les autres. Le médecin se caractérise aussi par la richesse et la complexité de ses savoirs. Vous choisissez la préhistoire, parce que « il y avait tout à apprendre » ; et la boussole aussi nous apprend à « trouver son chemin ».
Comment expliquez-vous cette prédominance ? Dans vos choix, l’apprentissage est indissolublement lié à l’échange et la transmission. La forêt est « généreuse » ; Lao Tseu enseignait la sagesse, etc.
Si je vous comprends bien la vieillesse est à la fois un âge où l’on apprend et enseigne, alors que dans l’enfance et la jeunesse on ne ferait qu’apprendre, et dans la maturité qu’enseigner (comme parent, comme éducateur ou enseignant). Ce serait seulement dans la vieillesse que ces deux compétences opposées et symétriques s’allieraient.
Pourquoi faut-il attendre si longtemps ? Qu’est-ce qui empêche les âges précédant la vieillesse d’atteindre cette réciprocité ?
Une couleur rouge car c’est flamboyant
Un bruit ou une musique de l’eau qui coule pour la pureté
Un animal un dauphin car il est malin
Un lieu ou un paysage des collines pour la douceur
Un végétal un coquelicot pour la chaleur de l’été
Une personne (grand homme, personne célèbre…) Françoise Dolto pour sa connaissance
Un métier maman
Une œuvre d’art
Une période de l’histoire le Moyen Age pour sa durée et sa richesse
Votre conception de la vieillesse me parait clairement positive et dynamique. Le rouge est une couleur vive ou, comme vous dites, « flamboyante » ; l’eau qui coule s’oppose à l’eau dormante ou stagnante ; elle va quelque part, elle n’est pas oisive ou passive. Le dauphin est le symbole de l’animal intelligent ou, comme vous dites, « malin » ; le couteau sert à « trancher », l’ortie est « piquante » et « acidulée ».
Mais ce dynamisme que vous voyez dans la vieillesse va de pair avec des valeurs sinon opposées, du moins contrastées : le calme des collines, la douceur qu’on attribue aux mamans, la statue qui incarne la stabilité.
J’aurais envie de vous poser la question : estimez-vous que ces aspects contrastés sont dans la vieillesse elle-même – dans toute vieillesse – ou bien pensez-vous plutôt que c’est la manière dont on accueille et vit sa vieillesse qui fait choisir l’un ou l’autre aspect ? Autrement dit : cette dualité est-elle pour vous une fatalité qu’on subit, un peu comme le « bipolaire » qui oscille entre des états d’excitation et de calme – ou bien est-ce un choix qui s’offre à nous quand on vieillit, une alternative toujours offerte mais qui n’est pas déterminée d’avance ?
Bonjour,
Vous opposez les deux aspects contrastés. Pour moi ils sont complémentaires. Je ne me sens pas dans une dualité, mais dans ma personne, qui est ainsi faite, et présente une certaine unité. (Je suis peut-être prétentieuse, ou trop sûre de moi…). Je ne ressens pas la subir, mais m’y enrichir.
Quant à la bipolarité, il s’agit pour moi d’un terme fort qui désigne une maladie mentale, où la personne oscille certes, mais en grande agitation et grand abattement..
Je vois bien, lorsque je m’occupe de mes petits-enfants, qu’il me faut être calme et douce, mais aussi dynamique et l’esprit en éveil!
Pour moi donc rien de subi, je ressens bien qu’il s’agit d’un choix, au moins en partie, pour ne pas me laisser submerger par les ennuis dus au vieillissement. Il faut bien souvent que je fasse appel à mes capacités de toujours, à mon énergie, à ma volonté. Que je ne m’endorme pas dans mon fauteuil, que je reste en éveil, et ce un peu sur commande… Il s’agit donc bien pour moi d’une alternative toujours offerte, qui n’est pas déterminée d’avance. Bien sur je parle en mon nom…
La vieillesse en général, je ne me rends pas bien compte. Elle arrive, elle est peut-être là, en progression sans aucun doute, je la regarde, elle me surprend souvent, comme nouvelle, me soucie parfois, me charme à un autre moment, elle a des avantages, des inconvénients, c’est une étape de ma vie, que je suis heureuse d’entamer le plus souvent avec joie. Il est vrai que j’ai la chance d’être en bonne forme…Je parlerais différemment si j’étais malade, je parlerai peut-être différemment, si je deviens souffrante et dépendante…
Encore une fois je parle pour moi…
Bonjour ,
Une couleur : un arc en ciel ( en plus des choix multiples , l’ évanescence = rien n’ est figé , tout se lie et se délie )
Un bruit : celui du vent dans une forêt , il vient d’ en haut ou se faufile , s’ adapte aux reliefs des branches , des arbres
Un animal : Hippocampe ou abeille noire ( sa rusticité , elle a survécu à plusieurs glaciations et est en voie d’ extinction )
Un lieu : Entre deux , entre-deux cumulonimbus
Un végétal : Coquelicot ( fragilité , singularité )
Une personne célèbre : Sylvain Tesson ( entre deux , un pas de côté , précision des mots , subtilité de l’ appréhension de la vie )
Un métier : Chercheur sur le cerveau
Une musique : Carmen pour ses tourbillons , Madame Butterfly pour la main tendue qui n’ a pas été saisie , le coeur qui se perd
Une oeuvre d’ Art : » Automat » de Edward Hopper
Un métier : Aviateur ( transcender le temps et l’ espace dans une réalité ? )
Votre « portrait » de la vieillesse me fait penser à la phrase de Victor Hugo : « Etre vieux, c’est avoir tous les âges ». En effet, beaucoup de vos choix suggèrent l’idée de polyvalence, d’une polysémie qui rend la personne insaisissable. A commencer par l’arc en ciel, irréductible à une seule couleur puisqu’il les contient toutes ; ou le vent, qui est fluide, fugace, polymorphe (il « s’adapte » aux reliefs, etc.) ; ou l’aviateur, qui survole toutes les choses et les voit de haut ; ou encore Sylvain Tesson, très éclectique dans ses activités littéraires comme dans la vie.
Mais derrière cette richesse apparente se profile une inquiétude : car fugacité va souvent de pair avec fragilité, comme en témoigne votre choix du coquelicot ou Madame Butterfly, dont l’amour repoussé finit tragiquement.
De ce point de vue le choix de l’œuvre de Hooper, «Automat » est au premier abord surprenant. Il représente une jeune femme, alors que vous y voyez une figuration possible de la vieillesse. Elle est seule dans un décor aseptisé, alors que vos autres propositions vont au contraire dans le sens d’une surabondance, d’un « survitalité ». Elle semble avoir très froid, alors que Carmen suggère au contraire la chaleur des « tourbillons ».
Le choix de ce tableau est le seul que vous n’avez pas justifié. Pouvez-vous mieux l’expliquer ?
Si la vieillesse était : Ce serait : Parce que :
Une couleur : Le rose La douceur
Un bruit ou une musique Les pleurs de Monsieur Ste Colombe –> Une nostalgie devenue légère et presque avec de la joie
Un animal Un chat –> C’est doux et indépendant
Un lieu ou un paysage Un bois –> Le clair obscur et la déambulation à l’abri avec des arbres qui ont la longue vie
Un végétal Un chou fleur –> De larges feuilles vert foncé à l’exterieur et ridées, mais encore des feuilles tendres et blanchatre à l’interieur
Une personne (grand homme, personne célèbre…) Marc Aurèle –> La sagesse « tendre » et « dure » du portique
Un métier Serrurier –> Celui là sait ouvrir les portes…et même les coffres forts
Une œuvre d’art La tour eiffel –> Arrivé en haut il faut redescendre…
Une période de l’histoire L’après guerre —> La paix de la fin
Un objet La lampe d’aladin —> Car il y a un génie dedans …
Merci pour l’exercice auquel m’a convié Nathalie Charras, en préparation d’une visio que nous organisons avec des animateurs SEVE sur « philosopher avec des personnes âgées »…
Les premiers choix de votre « portrait » sont nettement orientés vers la douceur (le mot revient plusieurs fois), la tendresse, la légèreté. Visiblement, la vieillesse signifie pou vous la fin des violences et des duretés de la vie adulte ; un retrait des nécessités et contraintes qui font de la vie un combat permanent.
Mais la suite introduit d’autres nuances. Notamment l’idée du déclin (redescendre, la « paix de la fin »). Cette perte de puissance semble être contredite par l’idée que la vieillesse pourrait à l’inverse être l’âge de pouvoirs nouveaux (la lampe d’Aladin, le serrurier qui « sait ouvrir les portes »). Comment conciliez-vous ces deux aspects apparemment contradictoires ? Pouvez-vous préciser en quoi et pourquoi la vieillesse aurait ou serait un « génie » ?
– Bonsoir, une place pour « Antichrist », s’il vous plait madame,
– Une seule place ?
– Oui, merci.
– …
– Voici monsieur votre ticket, bonne séance !
– Merci.
Il est à peine 18h00, dans la salle du cinéma nous sommes dix, pas davantage. Au bout de la rangée du premier rang, un homme très âgé s’avance lentement. Sa démarche est hésitante, le souffle paraît court. Il ne dissimule pas le tremblement de ses mains. Le peut-il ? Pourquoi le ferait-il ? Peut-être est-il octogénaire, peut-être nonagénaire ? Je ne sais pas. Et puis, qu’importe, la vieillesse a-t-elle un âge ? N’est-elle qu’un malencontreux imprévu ?
Dans la file d’attente je l’avais remarqué et je dois dire que je surpris de le voir ici. Ce n’est pas un film de son âge, pense-je ! En effet, il y a d’autres films à l’affiche, une comédie, plusieurs fictions, deux biopics, un documentaire, un opéra… Malgré cette large proposition, ce vieillard a précisément choisi de voir ce film, dramatique, sombre et violent.
Combien d’amis a-t-il encore devant lui ? Du coin de l’oeil, je me souviens l’avoir observé durant la projection. On ne regarde bien que les autres. On s’oublie parfois même si on est toujours le vieux de quelqu’un… Jamais je ne me suis senti aussi bête !
S’endormira-t-il ? Oui ! Non ? Quittera-t-il la salle avant la fin de la séance ? Pas du tout. Ses yeux brillent d’envies et de vie. Je le vois s’émouvoir, tantôt attendri, tantôt fantasmé… Il habite le film, mobilisé par le scénario ou séduit par le jeu de l’actrice, il ne perd pas une miette de ce long métrage classé pourtant dans les films d’horreur.
La salle est maintenant éclairée mais il reste assis jusqu’au bout du générique de fin. Je le vois songeur. De quelles pensées s’est-il emparé ? Quelques instants encore puis il quitte péniblement son siège, se retourne pour vérifier qu’il n’oublie rien. Il n’existe aucune pensée si lourde dont on ne peut s’éloigner, même à petits pas. Pas même le vieillissement.
Bonjour M GALICHET,
Conférencier, formateur. J’accompagne mes clients vers le départ à la retraite, le vieillissement. J’organise des séminaires de préparations à la retraite, des séminaires de prise de parole en public pour les ainés. Je suis déjà un sénior, mais je n’ai « que » 47 ans !
Une couleur : le bleu des petits jours bleutés, ce bleu hésitant entre la passion et la compassion.
Un bruit ou une musique : Un mi bémol, car la vieillissement porte à s’adoucir, à se pacifier. C’est la liberté.
« Voilà l’objectif final : conquérir soi-même une grande simplicité intérieure, mais comprendre jusque dans ses plus fines nuances la complexité des autres » – Etty HILLESUM.
Un animal : L’Homme, en tant qu’animal politique. Il convient de rester engagé, de prendre position et d’être attendu.
Un lieu ou un paysage : Une chambre car en vieillissant je me sens de plus en plus amoureux…
Un végétal : Le chêne. Il ne vieillit pas, il embellit. Ou peut-être une marguerite, c’était le prénom de ma grand-mère. Elle est décédée l’année passée à l’âge de 97 ans.
Une personne (grand homme, personne célèbre…) : Stéphane HESSEL car il a incarné la résistance, l’engagement, l’étonnement jusqu’à son dernier souffle.
Un métier : Marcheur/Flâneur… car « être cul de plomb, voilà par excellence le pêché contre l’esprit » NIETZSCHE. Vieillir c’est vivre avec intensité la beauté du monde, s’acoquiner de la lenteur…
Une œuvre d’art : Bélisaire demandant l’aumône de Jacques Louis David (1748-1825). La vie est un sujet littéraire. La vieillesse également.
Une période de l’histoire : Il est bien triste que le présent ne fasse pas partie de l’histoire… justement parce qu’il en est exclu. Alors, je vais choisir le 4/10/1945. C’est ce là qu’ont été signées les ordonnances instituant la sécurité sociale et donc la branche retraite.
Un objet : Le ciel, peut-être parce qu’avec un peu de folie, de sagesse, de raison, de naïveté, sur un coup de tête ou un pari, c’est là-haut que tout se dénoue…
Merci pour votre travail.
Bonjour,
J’aime bien votre petite « histoire » au début de votre intervention. C’est souvent en observant les autres, en nous demandant ce qu’ils pensent, ce qui les passionne, ce qui les émeut, que nous sommes portés à philosopher avec eux. Très souvent, dans les ateliers philo que j’animais avec des enfants, ce qui m’intéressait le plus, ce n’était pas ceux qui parlaient, mais ceux qui se taisaient, mais qu’on sentait très concernés par la discussion. C’est pourquoi j’attache beaucoup de prix à l’écriture avant et après débat : elle permet aux « taiseux » d’exprimer ce qu’ils pensent. Souvent leurs productions étaient plus riches et plus profondes que les interventions des « parlants » durant la discussion.
Votre portrait chinois me semble très nettement marqué par l’ambiguïté, l’oscillation entre deux polarités opposées, ce qu’on pourrait appeler l’entre deux : la « passion et la compassion », le bémol qui se situe entre deux notes, la simplicité et la complexité, la marche et la flânerie, l’engagement et le retrait, la folie et la sagesse. Visiblement pour vous la vieillesse, c’est la cumul de tous les possibles, ou, comme dit Victor Hugo, c’est « avoir tous les âges ».
Vous poussez le paradoxe jusqu’à dire que vieillir c’est embellir, devenir « de plus en plus amoureux », s’engager comme Stéphane Hessel, qui n’a jamais fait autant parler de lui que lorsqu’il était âgé.
D’où vient, selon vous, cette énergie de la vieillesse ? Car indiscutablement les forces déclinent, le corps s’affaiblit, les maux de toutes sortes se multiplient. Si la vie ne fournit plus les ressources qu’on attribue à la jeunesse, y a-t-il une autre source ? Et vous qui accompagnez beaucoup de seniors vers la retraite ou au-delà, trouvez-vous que tous ont cette grâce ou seulement certains ? Y a-t-il selon vous une manière de vivre sa vieillesse, ou plusieurs ?
A moi de vous remercier pour votre contribution à l’atelier. Vos remarques seront toujours très précieuses à ceux qui viennent sur le site ! Bien cordialement,
François Galichet
Bonjour,
Et merci François de votre retour.
La vieillesse pourrait être un concentré de tous les âges, un terreau fertile, le champ des possibles. Vous avez raison, d’où vient cette énergie de la vieillesse alors que les forces déclinent, et que le corps s’affaiblit ? De la même façon, d’où vient l’énergie de la vie ?
Le vouloir-vivre ? L’énergie cosmique ? L’étonnement ? La beauté ? La sagesse ? Le vice ou la passion… L’aboutissement de soi ?
Il n’y a pas une manière de vivre sa vieillesse, de la manière qu’il n’y pas une manière de vivre sa vie. Il n’y a pas davantage une manière de bien-vivre sa vieillesse, pas plus qu’il n’y de manière de mal-vivre sa vie.
Mais peut-être vieillissons-nous plus ou moins comme nous avons vécu. C’est cornélien !
Cette question du vieillissement recoupe bien évidement la question de la vie. Il me semble qu’à cet endroit, notre société occidentale commet l’erreur de prêcher le concept du bien-vieillir telle une injonction, une tyrannie selon les mots de Michel Billé. Je préfère l’expression mieux-vieillir.
Vieillir c’est encore vivre. Voici peut-être la façon la plus simple et la plus prometteuse d’appréhender le vieillissement.
Bien à vous.
Bonjour,
formée par l’association SEVE, je découvre votre site et en profite pour vous remercier du travail effectué.
Je vais animer des ateliers philo avec des personnes âgées et j’ai décidé de commencer par le portrait chinois.
J’ai voulu le « tester » par moi-même et en voici le résultat !
La couleur serait gris perlé rosé ; gris perlé, une couleur que j’associe à l’âge de la vieillesse, en lien avec la couleur des cheveux, mais perlé, car lumineux et en accord avec la nuance rosée qui apporte douceur et sourire. Je crois que c’est parce que je pense qu’il est bon d’être sage après tant d’années d’expérimentation de la vie et rayonnant de tout ce que l’on a compris…
Ce serait une musique mélodieuse, Bach ou autres du même style, symbolisant le calme, la lenteur que j’associe à cette période de la vie où l’on a peut-être cessé de courir pour Être davantage.
L’animal serait un chat, furtif et aimant dormir ! Il me semble que beaucoup de personnes âgées se font discrètes, n’ont pas ou plus besoin d’être sur le devant de la scène.
Le lieu serait une prairie en pleine nature pour son calme et son accessibilité. Proche de la nature.
Le végétal : un arbre, le cèdre, parce que c’est mon arbre préféré et qu’il me semble représenter une tranquille sérénité !
Le métier serait conteuse, car les personnes âgées ont forcément beaucoup à nous transmettre.
Enfin, l’objet serait une étole en laine pour réchauffer les frêles épaules. En écrivant cela, je me dis que c’est déjà un objet que j’apprécie ! 50 ans et pas toutes mes dents !
Merci de votre attention et de vos partages.
Emmanuelle
Bonjour,
Votre « portrait » évoque une grande diversité d’aspects de la vieillesse, qui lui sont communément attribués : la sagesse, la sérénité, la transmission, la fragilité. Il témoigne d’une conception qui me semble très positive, voire idéale, de cet âge : vous ne voulez en retenir que les côtés heureux, et non les misères et dégradations qui la caractérisent aussi parfois.
C’est donc un portrait que je qualifierai de « volontariste » : il décrit la vieillesse telle qu’elle devrait être, telle que nous voulons qu’elle soit, sans toujours y parvenir.
Si vous avez parcouru la page du site, vous aurez vu que le thème du chat revient souvent pour ce qui est de l’animal. C’est vrai que le chat est discret et « aime dormir ». Mais il a aussi la réputation d’être affectueux, intelligent et individualiste. Pensez-vous que cet individualisme (à ne pas confondre avec l’égoïsme) caractérise la vieillesse ?
Puisque vous allez animer des ateliers philo avec des personnes âgées, il serait intéressant de leur proposer cet exercice et de voir leurs réponses. Si vous le faites, je serais heureux d’en connaître les résultats et les remarques qu’il vous inspire.
Vous n’êtes pas la seule à animer ce type d’atelier. Peut-être avez-vous déjà vu sur le site de SEVE que Thierry Raffin a créé un groupe de partage pour les animateurs de ces ateliers. Si vous ne l’avez déjà fait, vous pouvez le contacter à l’adresse suivante :
thraffin@free.fr
Bien cordialement à vous,
François Galichet
Merci beaucoup de votre commentaire.
Oui, j’ai déjà participé aux partages de SEVE sur ce sujet.
J’ai animé l’atelier qui a beaucoup plu aux participants. Il s’avéra très intéressant d’approfondir les raisons qui justifiaient leurs choix et ce qu’ils associaient à chaque réponse donnée.
L’animal choisi fut pour tous le chat…
Le lien avec leur vécu et leurs valeurs était évident.
Ce fut une entrée en matière très agréable et un partage enrichissant.
Demeure un frein : lorsque j’évoque la possibilité d’animer des ateliers philo dans d’autres lieux, le mot « philosophie » semble générer à lui seul beaucoup de peurs, tout comme l’écriture, d’ailleurs. Pas facile, en tout cas dans mon expérience, d’aider les gens à franchir le pas malgré la simplicité, me semble-t-il, avec laquelle j’aborde la faisabilité de l’atelier.
Merci pour l’ensemble des ressources que vous mettez à notre disposition.
Bien à vous.
Emmanuelle
Bonjour Emmanuelle,
Effectivement, le chat est est un animal très souvent choisi pour symboliser la vieillesse.
Les significations en jeu sont évidentes, et je suis certain que vous avez su su les faire exprimer par les participants à votre atelier.
Quant à la difficulté que vous mentionnez, c’est vrai que le mot “philosophie” peut effrayer certains. Mais aujourd’hui on parle tellement de “débats philo” avec les enfants, les ados, les seniors et bien d’autres que le mot n’a plus la même connotation élitiste qu’avant.
C’est en continuant à la pratiquer comme vous le faites que cette difficulté disparaîtra d’elle-même !
Merci encore de votre retour et bon courage pour la suite,
François
Une couleur : La couleur bleu pâle, si apaisante.
Un bruit ou une musique : Le chant des oiseaux, si enthousiasmant, naturel.
Un animal : La poule, utile et fragile.
Un lieu ou un paysage : Une forêt, synonyme de promenade et solitude.
Un végétal : Un chêne, solide, millénaire
Une personne (grand homme, personne célèbre…)
Un métier
Une œuvre d’art
Une période de l’histoire
Un objet
Une couleur : La couleur bleu pâle, si apaisante
Un bruit ou une musique : Le chant des oiseaux, si enthousiasmant, naturel
Un animal : La poule, utile et fragile
Un lieu ou un paysage : Une forêt, synonyme de promenade et solitude
Un végétal : Un chêne, solide, millénaire
Une personne (grand homme, personne célèbre…) : Mon père, l’intelligence
Un métier : Ferblantier, l’art des métaux, la force
Une œuvre d’art : Joconde
Une période de l’histoire : L’après-guerre 40-45
Un objet : Mon ours en peluche
Ce qui me frappe dans votre « portrait » , c’est qu’il associe, pour décrire la vieillesse, des valeurs habituellement considérées comme contradictoires : la force (le ferblantier) et la faiblesse (la poule), la solidité (le chêne) et la fragilité (les oiseaux), la beauté (la Joconde) et l’intelligence (votre père), etc.
Tout se passe comme si la vieillesse parvenait selon vous à réconcilier ce que la vie opposait. Cela me rappelle un peu la phrase de Victor Hugo : « Être vieux, c’est avoir tous les âges ». Votre dernier choix, l’ours en peluche, évoque à la fois l’enfance (c’est un « doudou » usuel) et la protection (l’ours véritable a une image rassurante et affectueuse du fait de sa taille).
En vous lisant une question me vient. Cette représentation « synthétique » de la vieillesse provient-elle d’expériences réelles (du côtoiement de personnes âgées qui vous paraissent unir les contraires, dépasser les oppositions traditionnelles) – ou bien s’agit d’un idéal, d’une vieillesse fantasmée et idéalisée ?
Merci de votre contribution,
François Galichet
Bonjour,
Voici mes réponses à ce portrait chinois. Merci par avance de l’attention que vous y porterez.
UNE COULEUR : le gris, parce que c’est la couleur qui vient avant le noir, synonyme de mort, pour moi.
UN BRUIT OU UNE MUSIQUE : le bruit d’un ruisseau qui s’écoule, car c’est lent, tranquille et apaisant.
UN LIEU OU UN PAYSAGE : toujours un ruisseau au milieu d’une forêt avec de grands arbres tout autour, car cela m’inspire, le calme, la tranquillité, le non-besoin de s’agiter en tout sens, la sérénité.
UN VEGETAL : ce serait un gigantesque séquoia, car il aura eu le temps de grandir, de s’enrichir de connaissances, de s’éléver vers le ciel, il serait solide et majestueux.
UNE PERSONNE : Jean d’Ormesson, sans hésiter ! Il incarnait une énorme sagesse, un grand savoir et réflexion.
UN METIER : ce serait un métier d’art du genre ébéniste, mosaïste ou céramiste, qui nécéssite de la patience, de la minutie et de la méticulosité, tout en étant créatif. Savoir et prendre le temps de créer quelque chose d’original, d’authentique et de durable.
UNE PERIODE DE L’HISTOIRE : la période des « 30 Glorieuses » où j’ai l’impression que la place des gens âgés, des grands-parents était centrale et reconnue au sein de la famille et de la société.
UN OBJET : une canne en bois. La canne m’inspire la détérioration du corps, mais aussi un objet solide sur qui on peut compter pour avancer.
Je vous remercie et vous souhaite une bonne journée.
Corinne MESSERE
Bonjour,
Ce qui me frappe dans votre « portrait », c’est la dominance de l’idée de lenteur associée à la sagesse. Pour vous, la vieillesse est un « retour au calme », une période où l’on prend le temps de vivre, de réfléchir, de méditer. Ce thème s’illustre à travers la métaphore du bois, qui revient dans presque toutes vos réponses. Le séquoia, la canne évoquent la solidité, mais aussi la résistance et la permanence. Le ruisseau est entouré de « grands arbres » ; l’ébéniste lui aussi travaille le bois.
Or le bois est une matière qui présente une particularité singulière : c’est un être vivant et naturel (l’arbre) qui croit lentement (on ne le voit pas grandir) mais il peut devenir un outil (la canne) et un objet culturel (le meuble, la statue en bois, etc.). Une fois mort (quand il est coupé) il peut continuer à vivre d’une manière qui n’est plus biologique, mais artistique ou instrumentale. Pourrait-on dire que pareillement, la vieillesse est l’art de transformer la dégradation biologique en permanence spirituelle ? L’image du séquoia illustre cette dialectique : pendant sa croissance il emprunte les éléments de sa substance à la terre, l’eau et l’air ; mais ensuite il les restitue au centuple en absorbant le carbone de l’atmosphère, en favorisant l’humus, en abritant d’autres êtres vivants.
Le succès d’un livre comme « L’arbre monde » de Richard Powers (10-18) témoigne de cette prise de conscience des arbres comme valeur fondamentale.
La vieillesse pourrait être considérée comme le retour à un état, sinon végétatif, du moins « végétal » de l’existence.
Une dernière remarque sur votre référence aux « 30 Glorieuses » : êtes-vous si certaine que durant cette période la place des gens âgés était reconnue et valorisée ? Pour moi j’y vois plutôt les événements de mai 68, qui marquent l’avénement du « jeunisme » et des valeurs liées à la jeunesse….
Bonjour,
Je réessaie en ce début 2020, afin de voir l’évolution de ma pensée, quatre ans plus tard, sachant que j’ai été confronté à de nombreux décès.
Une couleur : Vert
Un bruit ou une musique : Les bruits de l’été, des chants d’oiseaux, un coq qui chante, le vent dans les draps qui sèchent au soleil
Un animal : Une poule
Un lieu ou un paysage : Paysage de campagne, toiture d’une église, les cimetières où reposent mes défunts
Un végétal : Un cerisier
Une personne (grand homme, personne célèbre…) : Marguerite Yourcenar, morte les yeux ouverts
Un métier : Le ferblantier
Une œuvre d’art : Jeune fille lisant (Auguste Renoir)
Une période de l’histoire : L’après-guerre 40-45
Un objet : Une machine à coudre
Merci !
Votre nouveau portrait ne me semble pas plus sombre que le précédent, malgré les deuils que vous avez connus. D’ailleurs vous reprenez certains choix, comme le vert. J’observe simplement que vos nouveaux choix sont plus simples, plus « naturels », moins sophistiqués que les précédents. Ainsi les bruits de l’été, les chants d’oiseaux remplacent Mozart ; la poule, animal plus « rustique », remplace le chien ; un paysage de campagne remplace le « lac avec montagne » ; le ferblantier remplace l’écrivain, Marguerite Yourcenar remplace Dieu, etc.
Faut-il en déduire que votre vision de la vieillesse s’est apaisée, simplifiée ? Votre portrait d’il y a quatre ans exprimait une représentation un peu « solennelle » de la vieillesse, comme période liée à la réflexion, au mystère (Dieu), à des paysages grandioses (montagnes), des artistes prestigieux (Mozart). Votre portrait d’aujourd’hui semble lui substituer une vision plus proche de la quotidienneté, de la vie naturelle « simple et tranquille » : un coq qui chante, la vie à la campagne, la lecture (jeune fille lisant), la période de l’après-guerre qui est celle de votre jeunesse, je suppose, plutôt que la Renaissance.
Cette évolution est-elle liée aux deuils que vous avez connus, qui d’une certaine manière vous auraient appris à dédramatiser la vieillesse – et la mort qui la suit ? Vous seule pouvez le dire….
* Une couleur : ?
* Un bruit ou une musique : la musique grunge parce qu’elle a accompagné ma jeunesse … et j’aimerais l’accompagner pendant mes vieux jours.
* Un animal : l’abeille parce que je voudrais qu’elle accompagne mes vieux jours
* Un lieu ou un paysage : la vallée de la Meuse parce que je n’imagine pas (ou bien plus) vivre ailleurs
* Un végétal : les légumes du potager parce que j’ai envie d’y travailler pendant mes vieux jours.
* Une personne (grand homme, personne célèbre…) : van Gogh
* Un métier : ?
* Une œuvre d’art : La cathédrale de la Nativité-de-la-Sainte-Vierge de Milan parce que je la trouve magnifique
* Une période de l’histoire : la période actuelle, parce que c’est la mienne
* Un objet : ?
Ce qui frappe dans votre « portrait » c’est que vos critères de choix sont presque tous relatifs à ce que vous aimeriez vivre ou connaître pendant votre vieillesse, alors que d’habitude on construit son portrait à partir de la représentation de la vieillesse issue du côtoiement de personnes âgées autour de soi. Votre portrait a un caractère « subjectif » qui tranche avec le caractère « objectif » de la plupart des autres portraits.
Du coup votre portrait, me semble-t-il, décrit davantage votre propre personnalité actuelle plutôt que la vieillesse. La musique grunge a « accompagné votre jeunesse », et je suppose que vous l’aimez toujours. La vallée de la Meuse (que je connais bien car mes grands parents habitaient Revin) est votre cadre de vie habituel et « vous n’imaginez pas vivre ailleurs ».La cathédrale de Milan vous la trouvez « magnifique » sans que cela exprime un âge particulier, mais plutôt une beauté intemporelle.
Bref, votre portrait a ceci de paradoxal qu’il décrit moins un âge déterminé (la vieillesse) qu’un style de vie qui n’est lié à aucun âge et qui vaut pour vous absolument. C’est d’ailleurs ce qu’exprime votre dernier choix : vous dites « la période actuelle, parce que c’est la mienne ». Comment mieux dire que la vieillesse n’est pour vous rien d’autre que la continuation de votre vie présente ?
Cette représentation de la vieillesse comme continuation de votre vie actuelle signifie-t-elle que vous ne la redoutez pas ? On ne sent dans votre portrait nulle crainte, nulle appréhension. Est-ce vraiment le cas ?
Couleur: Rose ou bleu ou gris, pastel, chacun presque blanc
Musique: Ouverture de l’Or du Rhin, ou « Il Diluvio » (Choeur des trois jeunes filles, Alarcon chef d’orchestre insurpassable)
Animal: Epagneul et condor
Lieu: Grand-place de Bruxelles, ou salar d’uyonu
Végétal: Ombre des hêtres ou d’un marronnier
Grand homme: Gaston Rebuffat et Montaigne
Métier: Restaurateur de meubles anciens
Peintre: Anker me touche beaucoup, tout comme Fra Angelico
Période fascinante: Haut-MoyenAge, après le baptême de Clovis
Objet:: Cafetière en porcelaine de Sèvres, reposant sur un support les deux pièces bordées de volutes dorées
Bonjour,
Votre portrait chinois est difficile à interpréter, car j’ai du mal à déceler une cohérence entre vos différents choix. Ils semblent exprimer davantage vos préférences personnelles – qui dénotent une grande culture – plutôt que votre représentation de la vieillesse.
Néanmoins je serais tenté de relever certains traits significatifs. Ainsi d’abord l’idée d’atténuation, de diminution par rapport à un état de plénitude. Le rose, le pastel, le gris sont des couleurs atténuées vis-à-vis de couleurs franches (le rouge, le bleu, le noir). Peut-être retrouve-t-on cette idée d’atténuation dans le choix de « l’ombre des hêtres ou d’un marronnier » : pourquoi avoir choisi l’ombre de ces arbres plutôt que l’arbre lui-même, sinon parce que l’ombre est l’image impalpable, évanescente de la chose dont elle est l’ombre ?
Ensuite l’idée de simplicité. Paul Anker comme Fra Angelico sont des artistes qui peignent des scènes épurées, réduites à l’essentiel, exprimant des sentiments à la fois familiers et purs. Peut-être retrouve-t-on cette simplicité d’une autre manière dans « Il Diluvio » et même dans l’ouverture de l’Or du Rhin ? Et aussi dans le choix de l’épagneul, chien qui symbolise la fidélité, l’amitié, l’attachement simple à son maître ?
Je verrais encore l’idée d’errance, notamment avec le choix de Rebuffat et Montaigne. L’un et l’autre symbolisent le goût de l’aventure, l’un pour escalader les sommets, l’autre dans le domaine de la pensée (encore qu’il soit aussi un voyageur). N’est-ce pas là une manière de dire que la vieillesse elle aussi est une sorte d’aventure, avec ses risques, mais aussi ses frissons et ses joies ?
Enfin on trouve dans certains de vos choix l’idée de sophistication, celle d’un « grand art » impliquant et exprimant des habiletés, des savoir faire techniques, une grande patience au service d’un art raffiné. La grande place de Bruxelles, la restauration de meubles anciens, la cafetière en porcelaine de Sèvre, avec la description détaillée que vous en donnez, iraient dans ce sens.
Ces quatre idées ne sont pas forcément cohérentes entre elles (notamment la simplicité et la sophistication ). Est-ce le signe d’un embarras, d’une ambivalence de la vieillesse pour vous, ou au contraire d’une valeur qui transcende les contradictions ? A vous lire, on a l’impression que vous êtes plutôt attirée par elle (ce que vous mentionnez sont plutôt des choses positives) mais qu’elle vous déconcerte par la diversité de ses aspects. De sorte qu’en définitive elle serait quelque chose d’insaisissable, de déconcertant, d’indéfinissable – à la manière de Montaigne qui se peint comme un « être ondoyant et divers ».
Si la vieillesse était…
Une couleur : tout le prisme car toutes les couleurs antérieures s’y mélangent
Un bruit de tigre avançant à pas feutrés, car elle est lente et implacable
Un escargot qui s’est fait une belle coquille protectrice et laisse son sillage sans se presser
Un lac de montagne alimenté par une petite cascade, c’est calme avec encore un courant de vie
Un vieil olivier dont les olives se raréfient, mais ancré dans ses racines
L’Ankou parcourant les landes bretonnes, sa faux à la main
Un cordonnier recousant des chaussures usées par les chemins parcourus
Les Bouddhas de Bamiyan, voués à la disparition mais encore vivants dans nos souvenirs
Des bâtons de marche car ils aident à parcourir encore un peu le monde
J’ai beaucoup apprécié la puissance évocatrice de vos métaphores. Il me semble qu’elles évoquent deux aspects contradictoires de la vieillesse.
D’un côté vous l’appréhendez comme une menace (le tigre « avançant à pas feutrés », l’Ankou) ; d’autre part au contraire comme une période de la vie où l’on se protège (l’escargot), où l’on revient à l’essentiel (le vieil olivier), où l’on tente de réparer inlassablement ce qui se défait (le cordonnier), où l’on trouve des substituts à la faiblesse qui gagne (les bâtons de marche). Le deuxième aspect est nettement plus important (du moins en nombre) que le premier.
Deux images tentent de faire la synthèse entre ces deux faces opposées : les Bouddhas de Bamiyan, qui sont à la fois morts et vivants ; et le prisme, qui est à lui seul la réunion de toutes le couleurs, du blanc au noir. Cette dernière image évoque la phrase de Victor Hugo : « Etre vieux, c’est avoir tous les âges ». Dans les portraits chinois publiés dans cette page, on retrouve souvent cette fonction synthétique de la vieillesse.
Enfin une dernière tonalité domine : le thème de la lenteur revient à plusieurs reprises (« à pas feutrés », « lente et implacable », « sans se presser », etc.). Cette lenteur, qui dans les âges antérieurs est plutôt considérée comme un défaut (on exige de nous d’aller vite, d’agir rapidement, etc.) devient avec la vieillesse au contraire une qualité. Comment expliquez-vous ce renversement ?
Merci pour ce retour intéressant !
La lenteur acceptée comme appréciation du moment présent, que l’on peut davantage savourer : moins d’obligations, de pression…
La lenteur rendue obligatoire par le ralentissement des facultés : le cerveau et le corps sont moins vifs.
Bien cordialement,
Eve
Merci pour ce retour intéressant !
Renversement :
La lenteur acceptée comme appréciation du moment présent, que l’on peut davantage savourer : moins d’obligations, de pression… ou / et :
la lenteur rendue obligatoire par le ralentissement des facultés : le cerveau et le corps sont moins vifs.
Laquelle entraîne l’autre ?
Bien cordialement,
Eve
Si la vieillesse était une couleur ce serait en noir et blanc parce que la télévision sont les premières images sur le monde
Si la vieillesse était un plat ce serait la soupe parce que c’est un bouillon de souvenirs
Si la vieillesse était un bruit ce serait une comtoise parce que la sonnerie retentie toutes les demies heure comme le temps qui passe
Si la vieillesse était un animal se serait une poule parce cela protège ses petits enfants
Si la vieillesse était un lieu ce serait une ferme parce que la terre leur histoire
Si la vieillesse était un végétal se serait le blé parce qu’il a fallu toute une vie pour en gagner
Si la vieillesse était une personne célèbre ce serait Simone Vieil parce que c’est les camps d’Auschwitz
Si la vieillesse était un métier ce serait agriculteur parce que c’est les corps fatigués
Si la vieillesse était une œuvre d’art ce serait la tour Eiffel parce qu’elle tient toujours debout
Si la vieillesse était une période de l’histoire ce serait 1969 parce que c’est les congés payés et la sécu
Si la vieillesse était un objet ce serait un livre parce qu’il c’est une vie à lire
Si la vieillesse était une danse ce serait la valse parce que ça fait tourner la tête
Bonjour,
Votre « portrait chinois » est très nettement orienté vers le monde naturel, celui de la campagne et de la vie paysanne : en témoignent vos références à la soupe , à l’horloge comtoise, à la poule, au blé, à la ferme, etc. Cela signifie-t-il que pour vous la vieillesse est une forme de « retour à la nature », à la vie simple, aux plaisirs élémentaires après une existence dominée par des soucis artificiels et sophistiqués ?
La référence à la télévision en « noir et blanc » , à la soupe, au blé (aliment primordial qui constitue le pain, symbole de la nourriture dans ce qu’elle a de plus essentiel), semble en témoigner.
La vieillesse semble liée pour vous à la fois à une certaine usure ou lassitude (les « corps fatigués ») mais aussi à une affirmation de fermeté malgré tout (la tour Eiffel qui « tient toujours debout »). Il me semble que la philosophie qui correspondrait le mieux à la conception que vous exprimez serait le stoïcisme : tenir bon en dépit de l’adversité, contre « vents et marées » (cf. la référence à Simone Veil et à Auschwitz).
La dernière proposition, la valse, résume cette ambiguïté : elle exprime un désir de joie, de convivialité ; mais « la tête qui tourne » suggère un peu la perte de conscience qui conduit à la mort. Celle-ci semble absente de votre « portrait chinois » : cela signifie-t-il que pour vous la vieillesse doit s’en détourner, ne pas y penser, se concentrer sur la vie qui reste ? Ou bien a-t-elle une place dans votre conception de la vieillesse, et laquelle ?
Bonjour,
Je suis en train de terminer la formation du module d’introduction SEVE, à Montréal par zoom! Je cherchais des activités en lien avec la philosophie pour enfants et je suis tombée sur votre site. J’ai fait l’exercice hier soir avec mon copain et nous avons longuement discuté! J’ai 44 ans et plusieurs deuils ont ponctué ma vie dans les dernières années. Voici mes réponses!
Un bruit: la rivière à mon chalet car silence et contemplation ponctué par un bruit constant
un paysage: la montagne de la Ste-Victoire: je n’ai jamais réussi à arriver à son sommet mais c’est un paysage de sagesse, de majesté
un homme célèbre: Léonard Cohen ( chanteur montréalais): il était prêt à partir , lors de son dernier album
une oeuvre d’art: la nuit étoilée de Van Gogh: rejoindre les étoiles en prenant l’apéro
période historique: 1564, la hutte du vieux sage dans un pays africain: pour garder le lien avec le passé et le présent
un métier: un écrivain biographe: narrer la vie des autres
merci, bonne journée!
Bonjour,
Il me semble que vos réponses sont très nettement dominées par l’idée d’un retour à la nature pure et vierge, c’est-à-dire avant les interventions (et les pollutions) provoquées par l’homme. La rivière qui coule fait, comme vous le dites, un bruit régulier et doux qui permet la méditation et la contemplation (au contraire des bruits de la civilisation moderne). La montagne Sainte Victoire évoque Cézanne, qui en a fait un thème de sa peinture : elle est désormais associée à l’art comme attitude contemplative ici encore. Je connais peu Léonard Cohen, mais je crois qu’il a chanté lui aussi la nature, la vie simple, la solitude. C’est aussi le cas de Van Gogh, dont beaucoup de tableaux – dont la Nuit étoilée – représentent des paysages naturels. La hutte africaine va dans le même sens : elle symbolise la simplicité d’une vie dépouillée et centrée sur l’essentiel.
Je pense donc que pour vous la vieillesse signifie d’une certaine manière la mise à distance de la civilisation moderne avec ses complications et ses préoccupations souvent dérisoires. C’est le retour aux origines de la naissance, avant l’éducation et la culture.
C’est évidemment très compréhensible. Mais cette vision un peu idyllique de la vieillesse n’efface-t-elle pas l’autre aspect, celui de la maladie, des handicaps, des fatigues et douleurs multiples qui l’accompagnent ? Peut-on méditer et contempler quand votre corps vous tourmente ?
Bonjour, et merci d’avance pour vos éclaircissements.
Une couleur: Le Brun, la couleur de l’écorce par ex., de ce qui se dessèche, se racornit…
Un bruit ou une musique: celui de la pluie, qui nous alanguit, nous pousse à rester à l’abri, à attendre et qui ralentit tout rythme
Un animal: le singe car il est plus malin et attachant que beau.
Un lieu ou un paysage: un paysage vallonné de Toscane, car c’est une vision paisible, classique voire très académique, représentant une nature maîtrisée et des villages ancestraux. Il y a beaucoup d’ennui aussi.
Un végétal: une écorce qui a protégé un tronc, puis qui se fragilise et tombe au sol.
Une personne (grand homme, personne célèbre…): Panoramix, le druide, savant et fragile, à la source de la force de sa communauté
Un métier: imprimeur. Métier laborieux qui a porté le savoir et à l’avenir incertain
Une œuvre d’art: une œuvre d’art contemporain qui cherche à provoquer par la représentation brutale et cynique de son idée.
Une période de l’histoire: le moyen-âge. Pour sa lenteur, sa précarité, l’ignorance et la violence des hommes et de la nature.
Un objet : des lunettes pour corriger un monde perçu de plus en plus flou.
Je vous souhaite une bonne journée.
Bonjour,
Vos choix me paraissent d’abord exprimer un besoin de protection très fort. L’image de l’écorce revient deux fois dans votre « portrait ». Vous dites vous-même qu’elle « protège le tronc » avant de se fragiliser elle-même. La pluie « nous pousse à rester à l’abri ». Les lunettes sont un accessoire conçu pour protéger les yeux. Le Moyen-âge que vous évoquez est une période caractérisée par les châteaux-forts ; ils visent à protéger leurs occupants contre des agresseurs potentiels. Panoramix, bien que « fragile », est souvent le protecteur de sa tribu, qu’il protège par ses conseils, la potion magique qu’il fabrique, etc. Même le métier d’imprimeur, que vous mentionnez, peut être considéré comme une manière de mettre à l’abri des pensées ou des écrits en les fixant-figeant dans un livre.
Ce besoin de protection qui caractérise pour vous la vieillesse a des contreparties négatives que vous évoquez également. « L’ennui », d’abord : se protéger, c’est souvent se confiner (on le voit bien en ce moment !) donc renoncer aux aventures, aux rencontres, à l’imprévu. C’est cet imprévu qu’évoque le singe, « malin et attachant » parce que source de surprises et de fantaisies. Peut-être aussi l’œuvre d’art contemporain, qui, dites-vous, « cherche à provoquer ».
Il me semble donc que vous exprimez, par ce portrait, l’idée que la vieillesse est un état contradictoire, où on cherche simultanément à se protéger et à s’exposer. On a besoin de plus de sécurité, de prendre moins de risques, de limiter les contacts. Mais en même temps on aspire à plus de variété, à secouer la torpeur dans laquelle elle vous plonge.
Cette contradiction vous semble-t-elle dépassable ? Est-ce pour vous une crainte – parce que vous n’êtes pas encore dans la vieillesse – ou un problème – parce que vous en éprouvez déjà les premières atteintes ? Pensez-vous que les personnes âgées doivent être protégées – comme on l’a beaucoup dit et répété ces derniers temps, par rapport à la propagation du virus – ou bien estimez-vous qu’elles ont le droit de s’exposer et de prendre des risques, comme beaucoup de seniors l’ont revendiqué en protestant contre des mesures à leurs yeux trop restrictives ?
1 couleur/noire/comme l’obscurité
1 bruit ou une musique/bruit d’une cascade/pureté de l’eau et son pouvoir lavant
1 animal/le paresseux/lent mais avance inéluctablement
1 lieu ou 1 paysage/ la montagne/position dominante
1 personne/le Dalaï Lama/ la sagesse
1 métier/ un peintre/
1 oeuvre d’art/ une peinture/
1 période de l’histoire
1 objet/ un oreiller/ sa douceur
Votre « portrait » de la vieillesse me paraît dominé par deux thèmes.
D’abord la lenteur. Le noir que vous évoquez comme associé à l’obscurité suggère un ralentissement des activités : la nuit il ne se passe généralement rien, on dort et la nature est engourdie. L’image de l’oreiller va dans le même sens : on l’utilise pour dormir ou se reposer. Le « paresseux » est l’emblème de la lenteur chez les animaux. La montagne symbolise l’immobilité majestueuse de ce qui reste à sa place.
Ensuite la pureté. Vous écrivez ce mot à propos de la cascade et de son « pouvoir lavant ». Le Dalaï Lama, qui incarne une forme de sagesse, est généralement associé à l’intégrité morale, au refus des compromissions, des calculs politiques. Quant au peintre et à la peinture, ils représentent aussi une forme de purification du réel : par rapport à celui-ci, le peintre ne retient que l’essentiel, il essaie d’en dégager un aspect ou une tonalité dominante, il élimine beaucoup de détails superflus ou insignifiants.
D’où ma question : quelle relation faites-vous entre ces deux thèmes ? Faut-il être lent pour être pur ? La lenteur est-elle une voie d’accès à la pureté ? Si c’était le cas, la vieillesse serait une forme de critique de l’obsession de la vitesse dans la civilisation contemporaine. Les vieux sont lents de par la dégradation de leurs capacités physiques ; mais cette perte serait un gain, elle permettrait de gagner en intensité et en intégrité.
Est-ce toujours le cas ? N’y a-t-il pas une forme de lenteur qui est tout l’inverse : l’incapacité à surmonter les difficultés et les obstacles, à prendre de la distance ou de la hauteur ? La lenteur est-elle une chance ou une malchance ?
Merci pour votre contribution à la réflexion commune !
Merci de votre réponse, elle m’interpelle.
La lenteur que je ressens me déroute. J’ai toujours été très active et maintenant que je vieillis, j’ai du temps mais il me sert à quoi?
La pureté a toujours été une motivation mais avais-je raison?
Je pense que ces deux thèmes s’entremêlent davantage maintenant que je suis en retraite.
Et je ne suis toujours pas parvenue à trouver un équilibre.
cordialement
Claude
Bonjour François,
Étudiante en philosophie, je découvre votre site à l’instant en parcourant le net à la recherche d’outils pour organiser à mon tour des ateliers. Le temps pour moi de vous remercier pour vos précieux conseils.
Voici mes réponses :
Si la vieillesse était une couleur, elle serait le gris, parce que l’âge accumule plus de souvenirs que de temps à vivre…sans doute l’image d’un film en noir et blanc aussi ou les retours en arrière au cinéma… la vieillesse nous rapproche de la mort que nous ne pouvons connaître : le gris pour l’inconnu.
Si la vieillesse était un bruit ou une musique elle serait une porte qui grince, comme les os de la personne âgée ? Une porte qui grince est une porte qui a du vécu. Pour la porte uniquement : signifie peut être aussi le passage ?
Si la vieillesse était un lieu ou un paysage elle serait coucher de soleil : sans doute la métaphore de la mort comme la vie qui se couche, qui s’endort…
Si la vieillesse était un végétal elle serait un saule pleureur, la posture descendante du vieillard : courbé en direction de la terre.
Si la vieillesse était une personne elle serait la sorcière de Blanche Neige, effrayante, redoutable et rebutante.
Si la vieillesse était un métier elle serait un enseignant de philosophie : sage et sachant.
Si la vieillesse était un objet elle serait un livre remplie d’histoires et de connaissances.
Au plaisir de vous lire,
Charlotte
Bonjour Charlotte,
Ce qui me frappe dans votre « portrait » de la vieillesse, c’est le contraste entre la première partie et la seconde. Vos cinq premières propositions ont comme tonalité dominante l’idée de la vieillesse comme un déclin, une perte ou diminution progressive des capacités et possibilités. Le gris est une couleur moyenne, qui résulte de l’affaiblissement de toutes les autres, donc d’une disparition des contrastes, des différences, des nuances. La porte qui grince est une porte rouillée, qui ne fonctionne plus très bien parce qu’elle est mal entretenue. Le coucher du soleil, comme vous le dites vous-même, est la dernière étape de sa course, la fin de la lumière du jour, le passage progressif à la pénombre, puis à la nuit. Le saule pleureur enfin suggère une sorte de retour à la terre, le paradoxe d’un arbre qui revient vers ses racines.
Bref cette première partie suggère que la vieillesse est quelque chose de l’ordre du défaut, de l’absence, de l’amenuisement de la vie, de ses différences, de ses contrastes, de ses éclats – bref, du négatif.
En revanche la seconde partie fait de la vieillesse quelque chose de positif : une « sorcière effrayante, redoutable et rebutante » n’est pas une vie moindre mais une vie autre, presque plus forte et plus vivace que la vie ordinaire. Le professeur de philosophie comme « sage et sachant » est aussi une figure positive : la sagesse et le savoir sont des capacités supplémentaires qu’on acquiert et non des pertes. Même chose pour l’image du livre « plein d’histoire et de connaissances » : on est ici dans une plénitude et non plus dans un manque ou une perte.
Si bien qu’en vous lisant, je me demande comment vous conciliez ces deux aspects contradictoires. S’agit-il d’options entre lesquelles il nous faudrait choisir : soit se résigner au déclin, soit se renforcer en sagesse et connaissance ? S’agit-il de processus simultanés ? Et si oui, quel rapport entre eux ? Est-ce que l’un est la condition de l’autre ? Est-ce qu’il faut accepter de perdre d’un côté pour gagner de l’autre ? Est-ce que la « porte qui grince » et s’ouvre sur l’inconnu permet de mieux vivre dès à présent ?
Une couleur, arc-en-ciel, représente pour moi la vie et ses couleurs
Une musique, un choeur d’hommes et de femmes, ils chantent à l’unisson
Un animal, l’oiseau, je les regarde et mes pensées vagabondent
Un paysage, la ligne d’horizon, j’ai 72 et demi, et le sentiment que peu à peu, elle s’efface
Un végétal, l’olivier, cadeau pour mes 70 ans
Une personne, ma mère, sachant à peine lire et écrire, pour tout ce qu’elle a accompli, souvent avec des « bouts de ficelle » sans jamais se décourager et en toute simplicité
un métier, conteuse, pour passer la mémoire du souvenir
une oeuvre d’art, les trois bleus de Miro, ils me parlent, me fascinent, je ne sais pas pourquoi
un objet, une paire de chaussures confortables, pour aller aussi loin que possible, rester debout
Bonjour,
Votre « portrait » associe nettement la vieillesse à l’idée de richesse, de profusion, d’abondance : l’arc-en-ciel, comme vous le dites vous-même, rassemble en lui toutes les couleurs ; le chœur fait chanter ensemble une multitude de personnes ; l’oiseau fait « vagabonder », donc proliférer vos pensées ; un paysage comprend en lui une multitude de choses – arbres, champs, rivières, habitations, etc. La conteuse connaît de très nombreuses histoires qu’elle mémorise et partage avec ceux qui l’écoutent. Les trois bleus de Miro multiplient par trois une seule couleur.
En vous lisant, je pense à la phrase de Victor Hugo : « Être vieux, c’est avoir tous les âges ». Loin d’être un appauvrissement, comme dans le portrait précédent, la vieillesse vous semble au contraire accumuler et réunir tout ce que la vie a produit de meilleur.
Mais en même temps une deuxième idée se profile à travers vos images : celle d’harmonie ou d’accord. L’arc en ciel n’est pas un mélange informe de couleurs ; il les distribue selon un ordre déterminé. Un chœur chante « à l’unisson » ; un paysage est souvent harmonieux par ses formes et les lignes qu’il dessine. Votre mère a su « se débrouiller » pour faire face aux difficultés de la vie malgré sa culture limitée. Bref la vieillesse n’est pas simplement l’accumulation de toutes les expériences de la vie ; elle est aussi une mise en ordre, une mise en perspective, une harmonisation de ce qui a été initialement vécu dans le chaos et le désordre.
Enfin une troisième idée me semble émerger : c’est l’idée de dignité, qu’exprime la dernière image, celle de la paire de chaussures : elle permet « de rester debout », de ne pas se coucher, c’est-à-dire s’avouer vaincu ou dominé par l’âge.
L’ensemble de votre portrait dégage une tonalité nettement positive, celle d’une vieillesse à la fois riche et heureuse, pleine et sereine.
Bonjour,
Merci pour ce portrait et vos interprétations qui m’inspirent quelques interrogations. Je vais tenter d’approfondir mes réflexions.
Je vous souhaite une bonne journée.
Une couleur : le rouge pour sa plénitude et son aspect vif
Un bruit ou une musique : le jazz, improviser toujours de nouveaux airs sur une mélodie fixée
Un animal : l’éléphant pour la transmission matriarcale
Un lieu ou un paysage : un fleuve pour la vie qu’il engendre autour de lui
Un végétal : un grand chêne qui donne de l’ombre bien sûr !
Une personne (grand homme, personne célèbre…) : un(e) chef(fe) d’Etat
Un métier : orateur public
Une œuvre d’art :
Une période de l’histoire
Un objet :
Bonjour,
Votre « portrait chinois » de la vieillesse surprend par des choix qui contrastent avec ceux employés habituellement pour la caractériser.
Ainsi le jazz évoque une musique animée, rythmée, entraînante, alors qu’on attendrait plutôt une musique lente, douce ou triste. Quand vous dites que le jazz est associé à l’idée « d’improvisation sur une mélodie fixée », vous soulignez que la vieillesse, loin d’être une perte de créativité, conduit au contraire à faire face à des situations nouvelles en puisant dans ses ressources d’ingéniosité. Il s’agit de rester fidèle à soi-même, mais en tenant compte de l’évolution de son corps, de son esprit, de sa situation sociale, etc.
Pareillement la couleur rouge est associée à l’idée sinon de violence, du moins de force, de vivacité (vous parlez « d’aspect vif ») alors que la plupart des choix (cf. dans ce forum) évoquent plutôt des couleurs comme le gris, le noir, le blanc ou le vert.
Ces deux choix témoignent d’une vision dynamique et positive de la vieillesse. Avez-vous des raisons particulières pour cela ?
Je ne saisis pas bien pourquoi vous avez choisi l’éléphant « en raison de la transmission matriarcale ». Pouvez-vous préciser ?
En revanche, le fleuve et le chêne expriment une tonalité un peu différente : non plus la créativité et la vivacité, mais plutôt l’idée d’une puissance lente et majestueuse, et aussi généreuse (le fleuve « engendre la vie autour de lui » ; le chêne « donne de l’ombre »). Cela signifie-t-il pour vous que la vieillesse serait l’âge d’un altruisme et d’une générosité que les âges précédents de la vie ne connaîtraient pas, ou moins ?
Quant au chef d’Etat et à l’orateur public (qui se rejoignent), ici aussi ces thèmes sont surprenants : on verrait plutôt la vieillesse comme une période de retrait et de repli de la sphère publique. Ici encore, pouvez-vous expliquer ce choix ?
Bien cordialement,
François Galichet
Merci pour votre analyse ! Et oui, pour moi la vieillesse est transmission, maturation et connaissance de soi pour mieux éclairer les autres et leur faire profiter de son expérience.
Bien cordialement,
Caroline