Philosopher avec les enfants

Pourquoi faire de la philo avec les enfants ? Si vous souhaitez le savoir, cliquez sur       Les enfants sont philosophes

Il y a plusieurs façons de susciter et de mener une discussion philosophique avec des enfants. Pour éviter la monotonie génératrice d’ennui, il est indispensable de varier les démarches d’une séance à l’autre. Cela permet aussi d’aborder une question ou une notion sous des angles différents, souvent complémentaires.

Dans cette page, cinq manières différentes de faire une discussion philosophique sont exposées brièvement. A vous de les mettre en œuvre !

Si vous le souhaitez, vous pouvez poser des questions, apporter votre témoignage, partager vos expériences en écrivant dans la fenêtre « Commentaires » au bas de cette page.

1.- Le débat à partir d’une question

Il consiste à poser une question et à essayer d’y répondre collectivement.

Vous trouverez dans Pratiquer la philosophie à l’école ( téléchargeable ici:

https://philogalichet.fr/telechargez-gratuitement-pratiquer-la-philosophie-a-lecole/

quinze sujets possibles, avec toutes les indications pour les aborder et animer une discussion.

Dans la mallette pédagogique « Les petits débats – philo – les droits de l’enfant » , éditée chez Belin pour l’UNICEF :

https://www.belin-education.com/les-petits-debats-philo

  • Qu’est-ce qu’un enfant ?
  • L’enfant a-t-il des droits ?
  • Qu’est-ce qu’une famille ?
  • A quoi sert l’école ?
  • Qu’est-ce que grandir ?
  • Garçons et filles sont-ils égaux ?
  • Qu’est-ce que penser ?
  • Les adultes ont-ils toujours raison ?
  • Que signifie « être exploité » ?
  • Qui suis-je ?

Mais les enfants vous en proposeront bien plus ! Ce n’est que dans les premières séances que vous êtes contraint(e) de proposer un sujet. Ensuite, si tout va bien, ce sont les enfants qui prendront le relais. Il vaut toujours mieux partir d’une question posée par les enfants que d’une question proposée par l’adulte.

Vous trouverez en cliquant ci-dessous quelques conseils pour organiser et démarrer une discussion :

Des conseils pour se lancer

Vous trouverez ci-dessous  le script de deux débats pour vous exercer à l’animation :

Pour mieux animer un débat philo

Si vous avez déjà expérimenté ce type de débat ou si vous envisagez de le faire, vous pouvez déposer vos remarques, témoignages, réflexions, questions, demandes sur le forum correspondant ici

2.- Philosopher à partir d’un livre, d’un conte, d’un album

Après la lecture, on commence par échanger « à bâtons rompus » sur l’histoire qui vient d’être racontée. Le plus souvent, ce sont des questions de compréhension qui surgissent d’abord. Elles permettent de vérifier que les enfants ont bien compris l’histoire, de rectifier les erreurs, les contresens, de la situer dans son contexte.

Ensuite on se focalise sur une question précise : pourquoi le héros a-t-il fait cela ? Que ferais-je si j’étais à sa place , et pour quelles raisons ? Qui est le plus moral, le plus sage, le plus libre ?

Pour plus de précisions, on consultera avec profit l’ouvrage d’Edwige Chirouter, Aborder la philosophie à partir d’albums de jeunesse (Hachette Education) : il recense de nombreux livres ou albums en fonction du thème choisi, et donne des pistes très stimulantes pour développer la réflexion autour d’eux.

Vous trouverez ici un extrait de vidéo pour illustrer la démarche.

http://www.cvb-videp.be/cvb/fr/catalogue/film/id/106#film-video

Si vous souhaitez échanger sur ce type de débat à partir d’un conte, d’un album ou d’un livre, partager vos expériences, poser une question, demander un conseil ou une aide, vous pouvez le faire sur le forum ici. Je répondrai à toute intervention dans la mesure du possible.

3.- Débattre autour d’un dilemme moral

Il s’agit de présenter aux enfants une situation concrète qui débouche sur plusieurs possibilités. On leur demande laquelle ils choisiraient et pour quelles raisons.

Vous trouverez ici deux exemples de dilemme. A vous d’en trouver d’autres !

Deux exemples de dilemmes moraux

Si vous souhaitez échanger autour de cette pratique du débat ou faire part de vos expériences, réussites et difficultés, demande d’aide ou de conseils, rendez-vous ici.

4.- Philosopher à partir d’images (« photolangage »)

Une image (photo,  dessin, tableau) peut être un support stimulant pour réfléchir sur une notion. Elle permet de concrétiser celle-ci, d’en présenter différents aspects ou facettes avant de tenter de la comprendre dans sa globalité.

La démarche la plus appropriée consiste à présenter aux enfants plusieurs images. On leur demande de choisir celle qui leur semble le mieux exprimer la représentation qu’ils ont de la notion. On fait ensuite un tour de table où chacun expose son choix et le justifie.

Dans un second temps, une discussion générale cherche à cerner la cohérence ou les contradictions constatées, et à voir si on peut les dépasser.

Vous trouverez ci-dessous un exemple de cette démarche appliquée à la notion d’autorité. Elle est extraite de la mallette « Les petits débats philo – Les droits de l’enfant » (Belin-UNICEF) :

Définir l’autorité à partir d’images

Cette mallette est toujours disponible chez Belin. En cas de difficulté pour l’obtenir, indiquez à votre libraire son n° ISBN : 978-2-7011-4338-5

5.- Philosopher en écrivant

Depuis Platon, la philosophie est une discipline qui se présente à travers des œuvres écrites. Les activités orales (débats, cours, discussions dans des colloques… ou entre amis) sont secondes par rapport à cette forme majeure de l’écriture. Les Méditations de Descartes, L’Ethique de Spinoza, la Critique de la raison pure de Kant, la Phénoménologie de l’Esprit de Hegel, le Zarathoustra de Nietzsche, L’Etre et le Temps de Heidegger, constituent des moments incontournables de l’histoire de la philosophie.

C’est pourquoi il importe que très tôt les enfants prennent goût à écrire de la philosophie et non pas seulement à (en) parler. Pour cela, une démarche consiste à leur demander, avant d’entamer un débat, d’écrire, chacun pour soi, leur réponse à la question posée ou leur définition de la notion soumise à leur réflexion.

Ensuite, chacun lit son texte aux autres et on essaie, ici encore, de relever les points de convergence et de divergence.

Vous trouverez ci-dessous un exemple de cette démarche à propos de la notion de liberté. Trois textes rédigés par les enfants d’une classe de CM1 de la banlieue de Strasbourg, parmi vingt autres , vous montreront la diversité des points de vue que les enfants peuvent développer.

Un exemple d’écriture philosophique

Chaque enfant peut conserver ses textes dans un classeur. Il constituera ainsi un « cahier de philosophie » qui lui sera personnel. Il est évidemment hors de question de noter ou d’évaluer un tel cahier. Il est même souhaitable, pour l’adulte, de ne le consulter qu’avec l’accord de l’enfant.

Les parents ou enseignants qui ont tenté cette démarche ont constaté que bien souvent, au bout d’un certain temps, les enfants écrivent spontanément dans leur cahier, même sans sollicitation de l’adulte.

C’est là le meilleur signe de la réussite du « philosopher avec les enfants » et de l’importance de cette réflexion pour le développement de vos enfants ou de vos élèves.

Pour approfondir votre réflexion et vous informer des pratiques existantes, vous pouvez consulter utilement les sites suivants :

Si vous écrivez dans la fenêtre « Commentaires » ci-dessous vos témoignages, récits d’expérience, questions, vous permettrez à tous les visiteurs de cette page de les partager, et peut-être de vous faire partager les leurs en retour. Je commenterai toutes les interventions et contributions. Merci d’avance de votre participation !

 

 

 

 

 

 

 

 

24 commentaires sur Philosopher avec les enfants

  1. Merci pour ce magnifique « article ». Je suis Cpe dans un College rural, avec une auteure jeunesse nous avons lancé un atelier philo avec des élèves de 5ème. Nous sommes partis d’un projet rectoral « illustrons la charte de la laïcité ». 1h/semaine à discuter (à apprendre à discuter: s’écouter, prise de parole, construire sa pensée et ses arguments…). l’objet cahier s’est imposé à nous car les élèves en ont eu besoin. Cahier philo: c’est extraordinaire ce que les enfants sont capables de faire, de construire, de penser… Une expérience incroyable pour nous adulte.
    Chaque semaine nous changeons de support (fable, textes, journaux, vidéos, chansons…).
    Cependant, c’est souvent bien difficile car au quotidien les élèves ne sont pas sollicités de la sorte, le savoir étant descendant et peu réfléchi ou construit avec eux. Leur demander de faire autrement n’est pas chose aisée! Mais le challenge en vaut la peine!!!

    1. Je suis heureux que vous confirmiez l’intérêt du « cahier de philosophie ». Vous dites : « Les élèves en ont eu besoin ». Pouvez-vous préciser pourquoi et comment est né ce besoin? Et « l’objet cahier » est-il un objet purement individuel, où chaque élève consigne ses pensées – ou bien les élèves s’échangent-ils ou se communiquent-ils leurs cahiers?
      Vous avez raison de souligner que la pratique du débat philo va un peu à contre courant des pratiques d’enseignement traditionnelles. Avez-vous pu associer des enseignants à la démarche ? D’après mon expérience, les professeurs de français sont souvent intéressés par la démarche philosophique, qui permet d’enrichir et d’étoffer l’approche littéraire.

  2. Je vous remercie vivement pour le partage de votre ouvrage. Je me suis
    lancée cette année dans les « débats philo » avec ma classe de CP-CE1. Je suis
    d’accord avec la difficulté évoquée : les élèves n’ont pas beaucoup
    l’habitude de réfléchir mais au bout de quelques semaines, on voit les
    évolutions et les bénéfices. Je trouve cette pratique extrêmement
    intéressante et compte bien continuer à la mettre en pratique. C’est là tout
    l’intérêt du document que vous nous proposez pour faire évoluer nos
    pratiques !
    J’ai de plus le sentiment d’être bien seule à pratiquer ces débats, alors je
    suis très volontaire pour partager ces pratiques !

    1. Je comprends votre souhait de pouvoir échanger avec d’autres
      enseignants pratiquant comme vous le débat philo.
      Je suis en contact avec plusieurs groupes de professeurs d’école qui se réunissent régulièrement pour en parler, dans diverses régions. Pouvez-vous me dire dans quel département vous exercez ? S’il y a près de chez vous un groupe dont je puisse vous donner les coordonnées, je le ferai volontiers.
      Sinon, vous avez toujours la possibilité de déposer sur cette page vos réflexions, questions, souhaits et difficultés sur ce sujet. J’essaierai d’y répondre, comme je l’ai déjà fait, et surtout j’espère que d’autres pourront participer à ces échanges !

  3. je sors du 1er we. J’ai été enthousiasmée et je me sens à ma place.
    J’habite dans le 05, Htes Alpes, connaissez-vous des enseignants ou animateurs philo près de chez moi?

  4. Je vous remercie également pour cet atelier en ligne que je découvre aujourd’hui. J’ai suivi la formation Seve et actuellement j’anime des ateliers en périscolaire, et je débute en médiathèque. Vos écrits vont m’être j’en suis persuadée très utiles !

    1. Sur la question des droits de l’enfant, vous pouvez consulter l’ouvrage « Les droits de l’enfant » de Françoise Dekeuwer-Défossez (PUF, Que sais-je ?) ou « Les Droits de l’enfant » de Françoise Martinetti, (Poche). Pour des activités dans le cadre de débats philo, je vous conseille l’ouvrage auquel j’ai participé pour l’UNICEF avec d’autres enseignants : « Petits débats philo : les droits de l’enfant », chez Belin.

    1. Votre question est tout à fait pertinente et elle est souvent posée dans les stages de formation au débat philosophique.
      Bien entendu, quand on parle d’évaluation, il n’est pas question de notation, ni même d’évaluation normative.
      Il s’agit plutôt d’aider les enfants ou les adolescents à mieux apprécier leurs compétences dans l’exercice de la pensée.
      Cette appréciation peut s’effectuer de deux points de vue.
      1°) D’abord du point de vue formel des compétences permettant de penser : conceptualiser, argumenter , problématiser, interpréter, etc.
      Il existe aujourd’hui des outils qui permettent de favoriser l’auto-évaluation des élèves de ce point de vue.
      A titre informatif, je vous mets ici un exemple de “livret” permettant aux élèves de mieux estimer leurs progrès dans ce domaine.
      2°) Ensuite du point de vue du contenu philosophique.
      Ici encore, je vous joins ici une grille susceptible d’aider les animateurs à faire la synthèse d’un débat avec le groupe, et donc à mieux évaluer les acquis d’un débat (et donc aussi les lacunes).
      Je reste à votre disposition pour toute précision que vous souhaiteriez.
      Bien cordialement,
      François Galichet

      https://philogalichet.fr/livret-dauto-eva…les-participants/

  5. Bonjour,
    Tout d’abord, je tenais à vous remercier pour ce site et vos partages, tous très instructifs, surtout quand on débute comme moi. Je m’apprête à réaliser un atelier philo avec une classe de CP dans le cadre d’un stage pratique, mais je rencontre des difficultés quant au choix de la question ( qui fera l’objet du débat) et à son introduction auprès des élèves. D’avance, je m’excuse de la longueur de mon message, mais je tenais à être le plus précis possible afin d’être le mieux compris ( y compris de moi-même).
    Dans beaucoup d’ouvrages que j’ai lus, on recommande que la question vienne des élèves, même si on concède que, pour des débutants et/ou des élèves de C1 et C2, l’adulte peut soumettre aux élèves une question, étant donné leur manque d’expérience et/ou leurs compétences psycho-cognitives. Etant donné le niveau de classe, je pense donc proposer une question, d’autant que, ce faisant, je pourrai réfléchir en amont à la question, poser quelques repères intellectuels/philosophique, ce qui, en plus de me rassurer, me permettra de  »guider » le débat de manière plus « avertie » et donc plus efficace. Ceci dit, je souhaiterais « amener » cette question, ne pas la proposer aux élèves à brûle-pourpoint, voire la faire émerger à l’esprit des élèves, que ce soit eux qui finalement la formulent ( même si tout était préparé à l’avance) afin qu’ils se l’approprient même si, au fond, cette question préméditée n’est pas la leur. Pour ce faire, je pensais avoir recours à un album de jeunesse (ou tout autre support) susceptible d’introduire cette question à l’esprit des élèves. Pensez-vous que cette démarche tienne la route ?
    Le cas échéant, mes difficultés sont d’ordres à la fois contextuel et général.
    Premièrement, je n’arrive pas à trouver une question philosophiquement pertinente, adaptée à l’âge des élèves et en lien avec la thématique souhaitée par l’enseignante qui m’accueille ( eu égard aux programmes et au contexte de la classe j’imagine). L’enseignante souhaiterait aborder les thèmes de l’obéissance (aux règles et à la loi) et/ou de la gestion de ses frustrations (on ne peut pas faire tout ce qu’on a envie, quand on en a envie). En cherchant des exemples d’ateliers philo, j’ai trouvé des questions du type : « Pourquoi les règles ? », « Pourquoi on ne peut pas faire tout ce qu’on veut ? », »Que veut dire obéir? ». Mais, je ne ne suis pas convaincu de leur pertinence. Dans « Philosopher à l’école primaire », Jocelyne Beguery conseille par exemple de privilégier, pour les élèves de C1 et début C2, non seulement des questions conceptuelle du type « Qu’est-ce que….? » ou « Quelles différences entre… », mais aussi des questions qui n’induisent pas un problème de nature morale. En outre, la question « Pourquoi on ne peut pas faire tout ce qu’on veut ? », qui revient souvent dans les exemples que j’ai pu lire, est toujours traitée comme si la volonté ( faire ce qu’on veut) était la même chose que le désir ( faire ce qu’on a envie, ce qu’on désire). Or la distinction entre désir et volonté me semble importante, mais sans doute trop difficile à aborder avec des élèves de CP ( mais alors la question est-elle encore pertinente?).
    De plus, à supposer qu’elles soient pertinentes pour des élèves de CP, je ne trouve pas de supports ( je n’ai cherché que du côté des albums pour enfants) susceptibles d’introduire ces questions auprès des élèves, sans trop orienter leur réflexion et ainsi biaiser le débat ( sans doute parce que les questions doivent venir des supports et non l’inverse). De tous les albums que j’ai consultés, « Oh non George! » (C. Haugthon) me semble être celui qui répond le mieux à tous ces critères. Reste que la citation d’Epictète en exergue (Nul homme n’est libre s’il ne sait se maîtriser) oriente davantage la lecture vers le thème de la gestion de ses frustrations en lien avec celui de la liberté et de la sagesse, thèmes plus difficiles à aborder avec des élèves de CP, il me semble. De plus, la portée philosophique de l’album suppose, pour le coup, de distinguer désir et volonté (George veut être sage, mais il a très envie de manger le gâteau).
    Deuxièmement, j’ai du mal à articuler le travail de compréhension/interprétation du texte et le travail de questionnement philosophique, à dessiner le chemin qui mènera les élèves de la compréhension/interpration de l’histoire ( de cet « échange « à bâtons rompus » sur l’histoire qui vient d’être racontée » selon vos mots) à la formulation de la question qui fera l’objet du débat. Si je m’en tiens à l’album « Oh non George », je perçois la teneur philosophique de cet album, mais je n’arrive pas à trouver 1) les questions possibles, en l’occurrence la plus  »légitime » par rapport à l’âge, à la philosophie, au contexte de la classe, voire par rapport à l’histoire elle-même, 2) les questions, tâches, activités à proposer aux élèves qui pourront les conduire de manière assurée à cette question.
    Plus généralement, comment trouver la question la plus légitime d’une histoire ? Comment amener les enfants à identifier collectivement cette question, celle qui sera retenue pour le débat ? Peut-on anticiper ce « chemin » ? Si oui, par quelles questions, tâches, activités proposées aux élèves ? Si non, comment fait-on alors pour amener, à partir de l’histoire lue, la question du débat (question qu’on a choisie à l’avance pour les raisons mentionnées ci-dessus), pour que les élèves s’approprient cette question ? Est-ce qu’elle peut émerger comme ça, naturellement, du seul travail de compréhension/interprétation de l’histoire ? Le cas échéant, comment gérer cette émergence spontanée et disparate ? Par des phrases du type “tiens, c’est intéressant ce que tu dis là”? Et, si le questionnement philosophique ne vient pas, comment le susciter ? Par des questions du type “Quelles questions réveille en vous cette histoire » ( risque d’avoir des questions qui ne décollent pas du contenu narratif de l’histoire) ?
    Concernant cette deuxième difficulté, j’ai consulté l’ouvrage d’Edwige Chirouter  » Aborder la philosophie en classe à partir d’albums de jeunesse » mais je n’y ai pas trouvé de réponses à mes questions méthodologique dans la mesure où, sauf erreur de ma part, chez l’auteur, les albums sont davantage utilisées pour nourrir la réflexion des élèves que pour faire émerger une question philosophique.
    Je ne sais pas si tout ce que j’ai dit est très clair et précis, suffisamment j’espère. Merci d’avance pour vos éclairages et conseils.

    1. Votre message pose beaucoup de questions très pertinentes, et il m’est difficile d’y répondre en quelques phrases.
      Pour aller à l’essentiel, je pense qu’au CP il est difficile de commencer un atelier philo par une question directe.
      Il faut passer par une histoire ou un conte, au moins au début. Non seulement cette démarche “tient la route”, mais c’est la plus éprouvée, et c’est la première qui a été utilisée (par Matthew Lipman, initiateur de la philosophie pour enfants)
      Dans le cas du problème que vous souhaitez aborder, une histoire correspond parfaitement à la question “Peut-on faire tout ce qu’on a envie?”. C’est le mythe platonicien de l’anneau de Gygès.
      Vous en trouverez une version pour enfants à partir de 6 ans dans l’album de Catherine Vallée et Jacinta Schapen, L’anneau de Gygès, aux éditions Eveil et Découvertes ou Cheval Vert.
      Dans l’ouvrage coordonné par Michel Tozzi, Débattre à partir des mythes (Chronique Sociale, 2006), il y a un long chapitre (chap. 3) consacré à l’utilisation pédagogique de ce mythe. Vous y trouverez des éléments de réponses aux questions que vous posez dans votre message. Certes, les exemples de débats et d’ateliers concernent plutôt le cycle 3 et le collège, mais vous devriez pouvoir aisément les adapter au niveau du CP.
      Je vous signale également le dessin animé Mily miss questions, souvent utilisé avec les jeunes enfants pour introduire une discussion. Un épisode, Invisible (coffret première saison) reprend l’idée du mythe de Gygès : si j’étais invisible, qu’est-ce que je ferais ?
      Le fascicule des Goûters philo consacré au Bien et au Mal contient également de multiples petites histoires ou situations qui peuvent vous aider à préparer la séance avec les enfants de CP.
      L’intérêt de partir du mythe de Gygès, c’est qu’on invite les enfants à se mettre à la place du héros et à imaginer ce qu’ils feraient dans cette situation. On évite ainsi le débat abstrait ou verbal pour développer une réflexion à partir de l’imagination.
      Selon moi, il n’y a pas de “question la plus légitime” d’une histoire ou d’un récit. Il faut laisser les enfants exprimer toutes les questions que cette histoire leur inspire (c’est ce qu’on appelle “la cueillette des questions”) et ensuite choisir avec eux celle qui recueille le plus d’assentiment.
      Rien que ce choix est déjà un processus très formateur. Il oblige à aller à l’essentiel, à distinguer les questions anecdotiques des questions vraiment philosophiques, c’est-à-dire universelles.
      Pour des élèves de CP, le dessin peut être un moyen d’expression de leur pensée. Par exemple, vous pourriez leur demander de dessiner ce qu’ils feraient s’ils étaient Gygès ( c.à.d.. invisibles) ; puis afficher les dessins et demander à chacun de commenter le sien. Cela permet de faire un premier “tour de table” à partir duquel une libre discussion peut ensuite se développer.
      Je suis certain que la plupart des questions que vous posez se résoudront tout naturellement quand vous animerez la séance. Il est bien rare que les enfants ne fournissent pas à l’animateur la matière qui permet d’aller plus loin !
      Quant à la façon de gérer cette “émergence spontanée et disparate”, je crois qu’il faut, à la fin de l’atelier, résumer en quelques mots les principales options ou idées qui ont émergé au cours du débat. Aux cycles 2 et 3 on peut le faire par écrit ; en revanche au cycle 1 la synthèse ne peut être qu’orale – et forcément brève.
      Bon courage et bonne chance pour votre stage ! N’hésitez pas à revenir sur le site pour dire comment cela s’est passé.

      1. Merci beaucoup pour ces précieux conseils ! Faute de temps, je n’ai pas pu les mettre en oeuvre lors de ma séance, mais ils m’éclairent pour celles à venir. L’ouvrage de M. Tozzi que vous mentionnez est en effet très instructif, notamment sur le passage du support (le mythe en l’occurrence) au questionnement philosophique. Néanmoins, ce passage reste encore difficile pour moi, sans doute parce qu’on ne peut pas entièrement le planifier mais aussi parce que le support n’est jamais au final un simple inducteur de la question, un simple prétexte. Il y répond toujours un peu.

  6. Bonjour, J’ai suivi avec intérêt et plaisir votre formation à Grenoble. Nos atelier
    vont commencer et je me réjouis de ce premier passage à la pratique. Nous allons nous confronter. Je suis très intéressée par l’environnement des mythes, cependant je pense que je serai plus à l’aise avec une question provenant d’un conte plus simple au début, tournant autour de  » la vérité est elle toujours bonne à dire ? »par exemple. J’aimerai pour ce faire utiliser une petite histoire mettant en scène une femme enceinte et trois fillettes, cependant je ne me souviens plus des références de l’album qui proposait cette histoire. Pouvez vous m’éclairer à ce propos ? Merci de votre attention et de votre réponse.
    .

    1. Bonjour Murielle,
      Je n’ai pas les références de l’album dont vous parlez. Ce n’est pas moi, mais une stagiaire qui l’a mentionné au cours de la séance, et je ne connais pas son nom.
      Sur le thème qui est le vôtre (la vérité est-elle toujours bonne à dire ?) je vous signale, sur le site http://www.philo-pour-enfants.com , le compte-rendu d’un atelier “Faut-il toujours dire la vérité?” pour des enfants de CE2- à CM2
      Comme vous le verrez, l’animatrice part de deux histoires avec différentes fins possibles.
      Je vous signale aussi dans les Goûters Philo (MIlan), “Pour de vrai et pour de faux”
      et l’album de Oscar Brenifier : “La vérité selon NInon” (Nathan).
      Bonne chance pour votre atelier !

    2. Bonjour Murielle
      Je me souviens de cette histoire. Il me semble que c’était une petite scène de théâtre issue du recueil « Petites pièces philosophiques ». 3 personnages rencontrent une femme qui vient d’accoucher et n’osent pas dire que le bébé est moche…
      J’espère que ma réponse n’arrive pas trop tard ! Et sinon, cela servira pour une prochaine fois…
      Bonne continuation et au plaisir de se retrouver au dernier week-end SEVE.

  7. bonjour
    un grand merci pour vos écrits qui sont une aide précieuse.
    j’apprends tellement en vous lisant.
    Je suis en fin de parcours de la formation SEVE et pour préparer mes ateliers vous êtes une source inépuisable de « recettes », de conseils, bref, merci merci.

  8. Bonjour et merci beaucoup pour ce compte rendu très tr s instructif et aidant lorsque l’on se lance dans les ateliers philo avec les enfants. Votre propos est clair et tranquillisant pour bien démarrer et organiser ce beau travail. Il y a cependant deux questions qui restent sans réponses pour moi : 1) dans le cas du philosopher à partir d’images, comment guider ou mener la discussion censée venir à la suite du tour de table? Une fois que chacun a dit son choix en effet, comment créer du lien et du débat collectif ? 2) de même, dans le cas du philosopher en écrivant, comment mener la discussion qui suit les présentations des définitions proposées par chacun. Je crois que ce qui me pose question c’est comment passer d’une intervention individuelle segmentée a un débat redevenu collectif ? Merci par avance de votre réponse. Je prépare actuellement les 3 ateliers que je devrai animer en école dans le cadre de ma formation SEVE, vos conseils seront précieux pour les préparer au mieux. Merci et belle journée à vous

    1. Bonjour,
      Vos questions sont parfaitement formulées et elles pointent un moment délicat d’un atelier philo centré sur le photolangage et/ou la proposition de définitions.
      Le mieux me semble de vous dire quelle est ma propre pratique, qui n’est pas un modèle mais une manière de passer, comme vous le dites très bien, de propositions individuelles et segmentées à un débat redevenu collectif.
      Lors du tour de table qui suit la présentation des images dans un photolangage, j’ai l’habitude de noter au tableau, à la fin de chaque intervention, les mots importants qui résument les raisons du choix de l’image (exemple dans le photolangage sur les âges de la vie : « tendresse », « amour » pour le tableau de Ghirlanfdajo, » respect », « obéissance » pour le tableau de Raoux, « Convivialité », « joie partagée », « plaisir », pour le tableau de Jordaens, etc.)
      Une fois le tour de table terminé, tout naturellement la liste des mots notés devient la matière à partir de laquelle on travaille. On élimine les redondances,on rapproche les termes voisins, on conceptualise ce qui était exprimé d’une manière concrète, etc. Cela permet d’aboutir collectivement à une « constellation » de sens, par exemple sous la forme d’un « ‘soleil » figurant les divers aspects d’une notion ou d’une question.
      A partir de là, je reprends chacun des « aspects conceptuels » et j »invite le groupe à rrechercher les problèmes et questions qui se posent à son propos. Par exemple, en ce qui concerne les relations inter-âges, à propos de la notion d’amour ou de tendresse : est-ce que l’amour favorise l’éducation ou bien ne peut-il pas être une entrave à une bonne éducation ? (voir le texte d’Alain qui dit que instruire et aimer sont incompatibles).
      Ici encore, ces questions sont notées au tableau. Ce qui permet ensuite d’en choisir une (par vote) et de la traiter sous la forme d’un débat classique.
      Il en va de même pour la démarche consistant à philosopher à partir de l’écriture personnelle. Les définitions lues et commentées par chacun peuvent être affichées (il suffit de demander de les écrire sur des feuilles en caractères assez gros pour pour être lus par tout le groupe). On peut ici encore procéder à un travail de regroupement (en rapprochant les définitions voisines) puis de reformulation (en synthétisant plusieurs définitions proches en une seule); et ensuite passer à la phase de problématisation comme ci-dessus.
      C’est là une démarche possible ; il y en a sûrement d’autres, qui sont tout aussi valables. Mais celle-ci permet de passer rapidement et naturellement de l’individuel au collectif.
      Je vous souhaite bonne chance pour vos ateliers. N’hésitez pas à exprimer sur ce forum vos expériences et vos difficultés : c’est par le partage des expériences qu’on parvient à progresser.
      Bien cordialement,
      François Galichet

  9. Bonjour,
    J’aimerais commencer à initier ma fille à la philo et j’aimerais le faire à la maison, pensez vous que ça aura un intérêt et un impact de le faire toutes les deux ? Au vu de votre article je pensais m’appuyer sur un livre/conte car elle a 3 ans. Et justement rapport à son âge est-ce trop tôt pour commencer ? J’en suis encore au stade de recherche donc je récupère les informations par ci par là. Je vous remercie pour votre travail mis à notre disposition et je vous souhaite une bonne journée/soirée. Cordialement.

    1. Bonjour,
      Il est parfaitement possible de commencer une réflexion philosophique avec un(e) enfant de trois ans si il ou elle a déjà un langage suffisamment élaboré pour exprimer des questions ou des inquiétudes. Un album ou un conte est évidemment un support incontournable à cet âge, parce qu’il permet de partir d’une histoire concrète. Bien entendu, à trois ans, il ne peut s’agir que d’albums très simples. Vous pouvez en trouver sur des sites comme :
      https://www.litterature-enfantine.fr/2020/01/21/top-20-des-albums-a-avoir-en-section-de-grands/

  10. Bonjour,

    Je suis étudiante en 1ère année de Master MEEF et je souhaite défendre la pratique du philosopher à l’école en EMC pour mon dossier d’option du CRPE. Je vais très bientôt réaliser ma séquence avec des élèves de cycle 3 et j’aurais beaucoup aimé avoir accès aux liens que vous proposez plus haut dans le tchat sur comment évaluer les débats philo, mais il n’y a plus d’accès…En effet, j’ai l’impression que l’auto-évaluation que je propose aux élèves est un peu trop simple « je sais écouter, j’arrive à prendre la parole, je suis capable de défendre mon point de vue avec des arguments…. ». Je vous remercie d’avance pour votre aide !

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